DESTINÉE (- suite non-officielle de la saison 4)
Posté : 17 févr. 2021, 15:38
PROLOGUE
Espagne, 15 janvier 1534.
— Allez, bois, ça te fera du bien, Fernando.
Le concerné leva des yeux dévorés par la fatigue vers l'Indienne, qui lui sourit machinalement. Les rides du Docteur étaient plus creusées que jamais, ses cheveux roux parsemés de filets gris étaient en bataille, son corps brûlant et dégoulinant de sueur tremblait, alors qu'il était étendu sur un petit lit. Les murs étaient tous peints en blanc, et il y avait très peu de meubles. Marinché, assise sur une chaise en bois, attrapa le verre posé sur la table de chevet et le tendit au malade, le visage glacé d'une sérénité spectaculaire.
— Bois ça aussi, tu as besoin de dormir.
— Qu'est-ce que c'est ? J'ai déjà bu trois tisanes tout à l'heure, dit-il d'une voix étouffée en réajustant sa couverture.
— Un petit remède que je t'ai préparé pendant que tu conversais avec Calmèque. Bois le, ça va atténuer la douleur et faire diminuer la fièvre.
Les yeux dans le vague, la tête appuyée dans le matelas moyennement confortable, l'ancien alchimiste balaya ses explications et sa proposition d'un geste de la main, ce qui eut le don d'agacer la femme aux longs cheveux noirs.
— Je ne guérirai pas. Je ne veux plus de tes remèdes imbuvables. Laisse moi, s'il le faut, j'attendrai la mort dans ce fichu lit délabré. Tout seul. Ce n'est pas comme si j'avais encore quelque chose à gagner ou à perdre dans ce monde de parasites sans cervelle.
Oh que non, cher Docteur, ton heure n'est pas encore arrivée, songea Marinché, les traits contractés en une grimace, le regard noir.
D'une main fébrile, Fernando sortit de sa poche un papier plié en quatre. Le souffle bloqué, pris de vertiges, il contempla le visage aux caractéristiques inimitables avec une tendre amertume. Elle était si belle... Elle le serait toujours, comme leur fille adorée.
Furibonde, fidèle à elle-même, la jeune femme se leva d'un bond, envoyant valser sa chaise. Les poings serrés, mettant en œuvre ses talents de comédienne dramatique, elle pressa les paupières, une fine larme dévalant sa joue.
— Tu ne comprends donc rien ? Je t'aime, pauvre fou. Je t'aime et tu le sais très bien ! Je ne peux me résoudre à t'abandonner dans les bras de la Mort sans rien faire, à te laisser mourir sous mes yeux... si tu ne le fais pas pour toi, Docteur, alors fais le pour moi. Je t'en supplie, Fernando, c'est tout ce que je te demande... s'il te plaît. Bois ça, guéris toi, accepte mon aide.
Il soupira profondément avant de déposer le petit dessin sur le meuble, sous les pupilles enflammées de l'Indienne, qui serra les poings. Puis, un voile blanc accaparant une bonne partie de son champ de vision, Fernando but le contenu du verre d'une traite. Le goût étrange de la boisson se répandit dans sa bouche. Bientôt, il se laissait de nouveau embrasser par Morphée, bercé par un silence assourdissant.
Pleinement satisfaite, Marinché croisa les bras sous sa poitrine, un sourire commençant à s'épanouir sur son visage mate.
Parfait.
Il avait eu sa dose journalière. Dormait profondément. Et l'Empereur l'attendait sûrement pour leur entrevue.
Après avoir planté un baiser sur les lèvres sèches de Laguerra, elle s'extirpa de la chambre et descendit les escaliers poussiéreux à la hâte, sa longue robe aux couleurs sombres valsant au gré de ses mouvements. La belle Indienne regarda par la fenêtre avant de soupirer, impatiente.
— Ça va pas, Volcanique ?
La question ironique de Calmèque la prit au dépourvu. Marinché se retourna mécaniquement vers lui, le considérant avec un dédain des plus méprisants, avant de le contourner pour empoigner sa sacoche et maquiller ses lèvres, devant le grand miroir qui ornait le mur. Elle lissa ensuite sa robe en soie, sous le regard de l'Olmèque blasé.
— Pourquoi tu ne réponds pas ? T'as perdu ta langue dans la bouche d'un abruti qui a eu le malheur d'être attiré par toi ou quoi ? Qu'est-ce qui se passe ?
— Rien qui ne te concerne. Et je te conseille vivement de ravaler tes mots ou...
— Ou quoi ? fit-il en bâillant, nullement intimidé, marchant vers elle.
La jeune femme lui jeta un regard meurtrier.
— Tu es mon serviteur. Tu me dois respect, loyauté et obéissance, espèce de...
— Tout doux, Mayonnaise. Je suis le serviteur du Doc', pas le tiens. Donc à moins que tu ne t'appelles Fernando Laguerra, je ne te dois rien. Alors, décompresse et bois un peu d'eau. Tiens, tant qu'on parle de lui, t'es sûr que tes trucs aux mauvaises herbes l'aident, au moins ?
Relevant le menton, la jeune femme se rapprocha à nouveau de la porte. Froide et hautaine, comme à son habitude.
Insupportable et paranoïaque, aussi, pensa Calmèque en jouant avec sa petite dague, un sourcil haussé, le dos appuyé contre le mur noir.
— Mais bien sûr que ça me concerne, Marmite ! Le Doc' est censé être mon maître et ça fait plus de trois semaines qu'il ne quitte plus son lit puant. Il est enceinte ou quoi ?
Son ton trahissait sa curiosité et une pointe d'inquiétude à l'égard de l'Espagnol.
— Il est malade, ça arrive à tout le monde, idiot. Sans mes remèdes et mes tisanes bien chaudes, il ne serait déjà plus de ce monde.
Toujours plus supportable que de devoir vivre avec toi, se dit alors le petit elfe en secouant la tête.
Il n'avait aucune sympathie, aucun respect et aucune confiance en cette femme agaçante qui semblait se prendre pour Dieu, mais la faire bouillir de rage était plus que jouissif et il s'ennuyait profondément.
— Trêve de bavardages inutiles. Je dois me rendre au palais royal, j'y suis conviée. Un ami du Docteur Laguerra va venir nous rendre visite, mais je ne pourrai pas l'accueillir comme il se doit. Je compte donc sur toi pour t'occuper de lui.
— Heureusement que t'as précisé que c'était un ami du Doc', j'ai pensé avec effroi l'espace d'un instant que t'avais des... amis.
Il fit mine d'être pris de frissons de dégoût, une grimace déformant son visage atypique. Les traits marqués par une irritation de plus en plus aigüe, Marinché souffla longuement, les yeux fermés.
— Il s'appelle Ambroise. Ambroise de Sarle. Mais il préfère qu'on l'appelle Ambrosius. Bon, j'y vais. Tu m'as déjà fait perdre assez de mon temps précieux.
Estime toi heureuse que je t'adresse la parole, espèce de cinglée...
Alors que les doigts de l'Indienne s'apprêtaient à tourner la poignet de la porte, Calmèque questionna, l'air de rien :
— Attends, donc tu t'attends à ce que je joue à le gentille domestique bien sage qui lui sert du thé tout en ondulant des hanches ? Non, mais parce qu'on va avoir un problème... Contrairement à Isabella, je n'ai pas tous les atouts nécessaires pour ce genre de trucs, moi...
Interdite, Marinché, les dents serrées, avança de quelques pas. Dominée par une rage soudaine, elle ouvrit grand les yeux, menaçante.
— Ne prononce jamais, au grand jamais, ce prénom. Tu as compris ? Et surtout pas en présence de Fernando. J'espère avoir été claire.
Décidément, il en fallait peu. Nonchalant, plutôt amusé, il ne répondit pas tout de suite. Exhalant un profond soupir, elle s'éloigna à nouveau, prête à rejoindre le roi d'Espagne. L'Olmèque la fixait toujours, près de l'escalier.
— Je sais que la longueur de mes cheveux t'hypnotise, mais tu pourrais tout de même te montrer plus discret, lui lança la jeune femme avec un sourire narquois, comme envahie par une bouffée d'assurance.
Il lui offrit un sourire similaire.
— Non, à vrai dire, ce qui me fait rêver, moi... c'est le bassin d'Isabella. Ses taches de rousseur, aussi. Et ses jambes...
Sans lui laisser le temps de rétorquer quoi que ce soit, il monta à l'étage, tenant un minimum à sa vie. Dans ta face, Machinière !
Les bras ballants, réprimant une éruption dont elle savait la lave visqueuse et les dégâts importants, elle quitta enfin la maison. Ce petit impertinent allait, de toute façon, bientôt payer.
Comme tout le monde.
Soudain, une étrange machine interféra dans son champ de vision, alors qu'elle se posait déjà sur le sol. Poussant un petit cri de surprise étouffé, Marinché regardait le scientifique âgé apparaître sous son regard insistant, tout sourire. Ses documents en main, Ambrosius se planta devant elle, rayonnant.
— Déjà ? lâcha l'Indienne, encore sous le choc.
— Je ne désirais pas vous faire attendre plus que cela, ma chère. Nous avons d'ores et déjà perdu beaucoup de temps. Toutes les informations concernant nos adversaires sont en notre possession dorénavant.
Zarès lui tendit la pile de feuilles en question, un énigmatique rictus dévorant une partie de son faciès. Rictus qui se refléta automatiquement sur celui de Marinché, qui les étudiait en silence.
Encore une bonne nouvelle.
— Avez-vous eu le temps de vous entretenir avec Charles de Habsbourg, ma chère ? demanda-t-il, curieux, en se munissant de quelques affaires.
— J'allais y aller, justement. Fernando est à l'intérieur de la maison. Fais bien attention à Calmèque, je me méfie de ce genre de parasites.
Il hocha la tête, sans un mot. Puis, les traits plus durs, Ambrosius lui dit :
— On suit le plan de départ. Mais je ne veux pas qu'on touche à Tao. Est-ce bien clair ? Sa place est à mes côtés.
Son ton sombre et sa posture incitèrent la jeune femme à opiner machinalement, vaguement intéressée par ses propos.
— Et en ce qui concerne les...
— Quoi ?!
L'exclamation agressive de Marinché surprit le savant, qui recula de quelques pas, battant des paupières. Les yeux exorbités, elle semblait bouillonner. Au sens propre du terme.
Eh bien...
— Tu dois faire erreur. Le capitaine et cette serpillière arrogante ne sont pas... elle...
— Oh, c'est de ça dont vous parlez. Mendoza s'est entiché de Laguerra, et la réciproque semble vraie. Un détail sans réel importance, lui expliqua le Français en haussant les épaules.
Le regard assassin, de nouvelles idées et envies destructrices se frayant un passage vers son esprit orageux, elle déclara :
— J'aurai deux mots à te toucher après mon entretien avec sa Majesté. Occupe toi de Fernando et continue tes recherches en attendant mon retour.
Espagne, 15 janvier 1534.
— Allez, bois, ça te fera du bien, Fernando.
Le concerné leva des yeux dévorés par la fatigue vers l'Indienne, qui lui sourit machinalement. Les rides du Docteur étaient plus creusées que jamais, ses cheveux roux parsemés de filets gris étaient en bataille, son corps brûlant et dégoulinant de sueur tremblait, alors qu'il était étendu sur un petit lit. Les murs étaient tous peints en blanc, et il y avait très peu de meubles. Marinché, assise sur une chaise en bois, attrapa le verre posé sur la table de chevet et le tendit au malade, le visage glacé d'une sérénité spectaculaire.
— Bois ça aussi, tu as besoin de dormir.
— Qu'est-ce que c'est ? J'ai déjà bu trois tisanes tout à l'heure, dit-il d'une voix étouffée en réajustant sa couverture.
— Un petit remède que je t'ai préparé pendant que tu conversais avec Calmèque. Bois le, ça va atténuer la douleur et faire diminuer la fièvre.
Les yeux dans le vague, la tête appuyée dans le matelas moyennement confortable, l'ancien alchimiste balaya ses explications et sa proposition d'un geste de la main, ce qui eut le don d'agacer la femme aux longs cheveux noirs.
— Je ne guérirai pas. Je ne veux plus de tes remèdes imbuvables. Laisse moi, s'il le faut, j'attendrai la mort dans ce fichu lit délabré. Tout seul. Ce n'est pas comme si j'avais encore quelque chose à gagner ou à perdre dans ce monde de parasites sans cervelle.
Oh que non, cher Docteur, ton heure n'est pas encore arrivée, songea Marinché, les traits contractés en une grimace, le regard noir.
D'une main fébrile, Fernando sortit de sa poche un papier plié en quatre. Le souffle bloqué, pris de vertiges, il contempla le visage aux caractéristiques inimitables avec une tendre amertume. Elle était si belle... Elle le serait toujours, comme leur fille adorée.
Furibonde, fidèle à elle-même, la jeune femme se leva d'un bond, envoyant valser sa chaise. Les poings serrés, mettant en œuvre ses talents de comédienne dramatique, elle pressa les paupières, une fine larme dévalant sa joue.
— Tu ne comprends donc rien ? Je t'aime, pauvre fou. Je t'aime et tu le sais très bien ! Je ne peux me résoudre à t'abandonner dans les bras de la Mort sans rien faire, à te laisser mourir sous mes yeux... si tu ne le fais pas pour toi, Docteur, alors fais le pour moi. Je t'en supplie, Fernando, c'est tout ce que je te demande... s'il te plaît. Bois ça, guéris toi, accepte mon aide.
Il soupira profondément avant de déposer le petit dessin sur le meuble, sous les pupilles enflammées de l'Indienne, qui serra les poings. Puis, un voile blanc accaparant une bonne partie de son champ de vision, Fernando but le contenu du verre d'une traite. Le goût étrange de la boisson se répandit dans sa bouche. Bientôt, il se laissait de nouveau embrasser par Morphée, bercé par un silence assourdissant.
Pleinement satisfaite, Marinché croisa les bras sous sa poitrine, un sourire commençant à s'épanouir sur son visage mate.
Parfait.
Il avait eu sa dose journalière. Dormait profondément. Et l'Empereur l'attendait sûrement pour leur entrevue.
Après avoir planté un baiser sur les lèvres sèches de Laguerra, elle s'extirpa de la chambre et descendit les escaliers poussiéreux à la hâte, sa longue robe aux couleurs sombres valsant au gré de ses mouvements. La belle Indienne regarda par la fenêtre avant de soupirer, impatiente.
— Ça va pas, Volcanique ?
La question ironique de Calmèque la prit au dépourvu. Marinché se retourna mécaniquement vers lui, le considérant avec un dédain des plus méprisants, avant de le contourner pour empoigner sa sacoche et maquiller ses lèvres, devant le grand miroir qui ornait le mur. Elle lissa ensuite sa robe en soie, sous le regard de l'Olmèque blasé.
— Pourquoi tu ne réponds pas ? T'as perdu ta langue dans la bouche d'un abruti qui a eu le malheur d'être attiré par toi ou quoi ? Qu'est-ce qui se passe ?
— Rien qui ne te concerne. Et je te conseille vivement de ravaler tes mots ou...
— Ou quoi ? fit-il en bâillant, nullement intimidé, marchant vers elle.
La jeune femme lui jeta un regard meurtrier.
— Tu es mon serviteur. Tu me dois respect, loyauté et obéissance, espèce de...
— Tout doux, Mayonnaise. Je suis le serviteur du Doc', pas le tiens. Donc à moins que tu ne t'appelles Fernando Laguerra, je ne te dois rien. Alors, décompresse et bois un peu d'eau. Tiens, tant qu'on parle de lui, t'es sûr que tes trucs aux mauvaises herbes l'aident, au moins ?
Relevant le menton, la jeune femme se rapprocha à nouveau de la porte. Froide et hautaine, comme à son habitude.
Insupportable et paranoïaque, aussi, pensa Calmèque en jouant avec sa petite dague, un sourcil haussé, le dos appuyé contre le mur noir.
— Mais bien sûr que ça me concerne, Marmite ! Le Doc' est censé être mon maître et ça fait plus de trois semaines qu'il ne quitte plus son lit puant. Il est enceinte ou quoi ?
Son ton trahissait sa curiosité et une pointe d'inquiétude à l'égard de l'Espagnol.
— Il est malade, ça arrive à tout le monde, idiot. Sans mes remèdes et mes tisanes bien chaudes, il ne serait déjà plus de ce monde.
Toujours plus supportable que de devoir vivre avec toi, se dit alors le petit elfe en secouant la tête.
Il n'avait aucune sympathie, aucun respect et aucune confiance en cette femme agaçante qui semblait se prendre pour Dieu, mais la faire bouillir de rage était plus que jouissif et il s'ennuyait profondément.
— Trêve de bavardages inutiles. Je dois me rendre au palais royal, j'y suis conviée. Un ami du Docteur Laguerra va venir nous rendre visite, mais je ne pourrai pas l'accueillir comme il se doit. Je compte donc sur toi pour t'occuper de lui.
— Heureusement que t'as précisé que c'était un ami du Doc', j'ai pensé avec effroi l'espace d'un instant que t'avais des... amis.
Il fit mine d'être pris de frissons de dégoût, une grimace déformant son visage atypique. Les traits marqués par une irritation de plus en plus aigüe, Marinché souffla longuement, les yeux fermés.
— Il s'appelle Ambroise. Ambroise de Sarle. Mais il préfère qu'on l'appelle Ambrosius. Bon, j'y vais. Tu m'as déjà fait perdre assez de mon temps précieux.
Estime toi heureuse que je t'adresse la parole, espèce de cinglée...
Alors que les doigts de l'Indienne s'apprêtaient à tourner la poignet de la porte, Calmèque questionna, l'air de rien :
— Attends, donc tu t'attends à ce que je joue à le gentille domestique bien sage qui lui sert du thé tout en ondulant des hanches ? Non, mais parce qu'on va avoir un problème... Contrairement à Isabella, je n'ai pas tous les atouts nécessaires pour ce genre de trucs, moi...
Interdite, Marinché, les dents serrées, avança de quelques pas. Dominée par une rage soudaine, elle ouvrit grand les yeux, menaçante.
— Ne prononce jamais, au grand jamais, ce prénom. Tu as compris ? Et surtout pas en présence de Fernando. J'espère avoir été claire.
Décidément, il en fallait peu. Nonchalant, plutôt amusé, il ne répondit pas tout de suite. Exhalant un profond soupir, elle s'éloigna à nouveau, prête à rejoindre le roi d'Espagne. L'Olmèque la fixait toujours, près de l'escalier.
— Je sais que la longueur de mes cheveux t'hypnotise, mais tu pourrais tout de même te montrer plus discret, lui lança la jeune femme avec un sourire narquois, comme envahie par une bouffée d'assurance.
Il lui offrit un sourire similaire.
— Non, à vrai dire, ce qui me fait rêver, moi... c'est le bassin d'Isabella. Ses taches de rousseur, aussi. Et ses jambes...
Sans lui laisser le temps de rétorquer quoi que ce soit, il monta à l'étage, tenant un minimum à sa vie. Dans ta face, Machinière !
Les bras ballants, réprimant une éruption dont elle savait la lave visqueuse et les dégâts importants, elle quitta enfin la maison. Ce petit impertinent allait, de toute façon, bientôt payer.
Comme tout le monde.
Soudain, une étrange machine interféra dans son champ de vision, alors qu'elle se posait déjà sur le sol. Poussant un petit cri de surprise étouffé, Marinché regardait le scientifique âgé apparaître sous son regard insistant, tout sourire. Ses documents en main, Ambrosius se planta devant elle, rayonnant.
— Déjà ? lâcha l'Indienne, encore sous le choc.
— Je ne désirais pas vous faire attendre plus que cela, ma chère. Nous avons d'ores et déjà perdu beaucoup de temps. Toutes les informations concernant nos adversaires sont en notre possession dorénavant.
Zarès lui tendit la pile de feuilles en question, un énigmatique rictus dévorant une partie de son faciès. Rictus qui se refléta automatiquement sur celui de Marinché, qui les étudiait en silence.
Encore une bonne nouvelle.
— Avez-vous eu le temps de vous entretenir avec Charles de Habsbourg, ma chère ? demanda-t-il, curieux, en se munissant de quelques affaires.
— J'allais y aller, justement. Fernando est à l'intérieur de la maison. Fais bien attention à Calmèque, je me méfie de ce genre de parasites.
Il hocha la tête, sans un mot. Puis, les traits plus durs, Ambrosius lui dit :
— On suit le plan de départ. Mais je ne veux pas qu'on touche à Tao. Est-ce bien clair ? Sa place est à mes côtés.
Son ton sombre et sa posture incitèrent la jeune femme à opiner machinalement, vaguement intéressée par ses propos.
— Et en ce qui concerne les...
— Quoi ?!
L'exclamation agressive de Marinché surprit le savant, qui recula de quelques pas, battant des paupières. Les yeux exorbités, elle semblait bouillonner. Au sens propre du terme.
Eh bien...
— Tu dois faire erreur. Le capitaine et cette serpillière arrogante ne sont pas... elle...
— Oh, c'est de ça dont vous parlez. Mendoza s'est entiché de Laguerra, et la réciproque semble vraie. Un détail sans réel importance, lui expliqua le Français en haussant les épaules.
Le regard assassin, de nouvelles idées et envies destructrices se frayant un passage vers son esprit orageux, elle déclara :
— J'aurai deux mots à te toucher après mon entretien avec sa Majesté. Occupe toi de Fernando et continue tes recherches en attendant mon retour.