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Re: FANFICTION COLLECTIVE : Tome 2
Posté : 03 avr. 2022, 14:29
par nonoko
IsaGuerra a écrit : 03 avr. 2022, 13:49
Et bien Nonoko ton post tombe vraiment à pic ! J'ai commencé à relire le tome 1 (un vrai plaisir de ressortir cette belle histoire) la semaine dernière ce qui fait que je vais pouvoir enchaîner les nouveautés
Bon après vu ma vitesse de lecture je suis loin de lire ce nouveau chapitre mais ça va être un vrai plaisir de relire les mésaventures de Mendoza surtout avec ton talent chère Nonoko
Prends ton temps, comme ça j'aurai le temps d'avancer dans la suite! Et puis si tout le monde se met à relire le Tome 1, je sens que Seb va insister pour la remasterisation rapide, va falloir du renfort! Merci de suivre encore tout ça!
Raang a écrit : 03 avr. 2022, 13:32
Je ne vais pas bouder mon plaisir de pouvoir lire le nouveau cru des vignes NONOKO
En termes d'histoire je suis un peu largué, mais en terme de narration et de qualité d'écriture je suis toujours époustouflé par ton talent
Merci, Maître Raang, allez, le Tome 2 te tend les bras, tout frais après son relifting.
@Teeger, les retrouvailles entre Mendoza et Isabella, ce sera au chapitre 23!
Re: FANFICTION COLLECTIVE : Tome 2
Posté : 03 avr. 2022, 14:36
par IsaGuerra
nonoko a écrit : 03 avr. 2022, 14:29
Prends ton temps, comme ça j'aurai le temps d'avancer dans la suite! Et puis si tout le monde se met à relire le Tome 1, je sens que Seb va insister pour la remasterisation rapide, va falloir du renfort! Merci de suivre encore tout ça!
Prend tout ton temps pour écrire : La vitesse d'écriture je ne jugerais pas vu ma propre vitesse pour ça. Tu as tout ton temps
Et pour ce qui de la remasterisation... Bah pour être honnête je m'en fiche un peu j'aime beaucoup la première version telle que je l'ai lu en 2017 et que j'ai relu la semaine dernière
Re: FANFICTION COLLECTIVE : Tome 2
Posté : 03 avr. 2022, 14:43
par TEEGER59
nonoko a écrit : 03 avr. 2022, 14:29
@Teeger, les retrouvailles entre Mendoza et Isabella, ce sera au chapitre 23!
Ô joie!
Re: FANFICTION COLLECTIVE : Tome 2
Posté : 03 avr. 2022, 20:10
par Ra Mu
Sa silhouette épaisse, drapée dans une bure vert brunâtre, se confond presque avec la tenture mordorée
Le méchaaaaaaaaaaant! Le méchaaaaaaaaaaaaaaaant! Il s'habiille tout en noi... heu..brun Verdâtre! C'est lui le méchaaant" (comprend qui peut

)
Enfin le Boss final! Merci Nonoko pour ces lichottes de MCO bien écrites.
Re: FANFICTION COLLECTIVE : Tome 2
Posté : 04 avr. 2022, 08:50
par Raang
Ra Mu a écrit : 03 avr. 2022, 20:10
Sa silhouette épaisse, drapée dans une bure vert brunâtre, se confond presque avec la tenture mordorée
Le méchaaaaaaaaaaant! Le méchaaaaaaaaaaaaaaaant! Il s'habiille tout en noi... heu..brun Verdâtre! C'est lui le méchaaant" (comprend qui peut

)
Oui, on-a-bien-com-priiiiis :p *tin tin tiiiiin*
une référence comme ça, ça se souligne et s'applaudit
Re: FANFICTION COLLECTIVE : Tome 2
Posté : 04 avr. 2022, 13:50
par nonoko
Alors moi j'hésite encore entre plusieurs hypothèses:
1. Tu as été traumatisée par Guignol quand tu étais petite.
2. Tu as trop regardé L'aile ou la cuisse.
3. C'est tiré du film culte "L'étrange Noël de M. Poubelle".
4. C'est tiré d'un film art et essai moldave diffusé autrefois au cinéma de minuit.
5. Ce n'est de rien de tout ça et je donne ma langue au Grand Chat.
En tout cas merci de stimuler nos neurones!

Re: FANFICTION COLLECTIVE : Tome 2
Posté : 08 avr. 2022, 18:07
par nonoko
C'est le week end, voici un petit carré de chocolat! Bonne dégustation...
Partie 3.
Cela avait été un jeu d’enfant. Elle imaginait déjà les compliments de sa maîtresse quand elle lui annoncerait que non seulement elle savait où se trouvait le seigneur Gomez, mais qu’elle avait pu lui parler et qu’elle avait arrangé un rendez-vous. Les domestiques de l’aile gauche n’avaient guère apprécié de devoir préparer l’accueil au pied levé de cet hôte indélicat qui se présentait de si bonne heure au château et l’aide que Liselotte leur avait proposée fut acceptée sans sourciller. Personne n’avait envie de rajouter du travail au travail. Elle avait pris cette initiative sur un coup de tête, et avait aussitôt ressenti cette impression de liberté promise par Isabella. Il s’agissait cependant à présent de tirer parti de sa présence face au visiteur, sans maladresse. Il était à demi allongé sur une méridienne et semblait somnoler, quoique la jeune femme n’en fût pas sûre, puisqu’il portait un bandeau sur un oeil. Il avait jeté son manteau de voyage sur un fauteuil et dégrafé son pourpoint pour être à l’aise, et il ne se souciait pas le moins du monde de la présence de Liselotte. Tout en arrangeant les préparatifs pour une collation, cette dernière se permit de l’observer à sa guise, jaugeant ses chances d’attirer son attention autrement que par une invitation polie à faire honneur à la nourriture. Même allongé ainsi négligemment, il avait une prestance impressionnante. Liselotte sentit sa résolution fondre. Jamais elle n’oserait. Elle s’imagina alors à la place de l’homme, allongée sur la méridienne, comme elle s’asseyait sur le fauteuil de sa maîtresse sans la moindre gêne. Après tout, elle était entrée, elle n’allait pas renoncer si facilement. Il n’y avait entre eux qu’une différence de statut purement artificielle, il suffisait de s’en convaincre pour trouver le courage de s’adresser à lui comme à un homme rencontré dans la rue et auquel elle devait transmettre une information importante, sans plus se soucier des convenances et du rang. Elle allait ouvrir la bouche quand il la prit de court.
Go : Quand cesserez-vous de m’observer à la dérobée ? Vous n’avez jamais vu un homme ?
Elle se figea, à moitié penchée pour servir une tasse de café. Il tourna vers elle son visage, la contempla un instant puis se redressa pour se lever et venir vers elle. Elle posa sa cafetière du geste le plus assuré qu’elle put pour pouvoir se tenir face à lui les mains libres. Il avait l’avantage de la taille, mais elle avait l’habitude de s’adresser à des personnes qui la dominaient facilement d’une ou deux têtes, car elle ne dépassait pas le mètre cinquante.
Go : Vous désirez peut-être me parler ?
Elle fut contrariée qu’il ait vu aussi clair dans son jeu, mais au moins celui lui facilitait les choses.
Go : Attendez ! Laissez-moi deviner…
Il avait prononcé ces quelques mots d’une voix douce tout en posant son doigt sur ses lèvres. Elle fronça les sourcils, ce qui le fit rire. Il continua sans retirer son doigt. Elle n’osait bouger, mais avait une furieuse envie de le mordre. Pourquoi les hommes ne pouvaient-ils se comporter autrement ?
Go : Vous avez quelque chose d’important à me dire, mais vous n’osez…
Quelle sagacité !
Go : Nous avons tout notre temps…
Li : Peut-être ai-je d’autres obligations que de vous servir votre collation…
Elle s’était reculée d’un pas, dégageant sa bouche. Il sourit en croisant les bras.
Go : Bien bien bien, je ne voudrais pas vous retenir dans ce cas. Mais vous n’aviez pas l’air pressée tout à l’heure.
Il la fixait intensément. Il fallait saisir l’occasion ou partir.
Li : Quelqu’un veut vous voir. Ma maîtresse. Isabella Mendoza.
Go : Votre maîtresse ? Voici donc ce qui me vaut le plaisir de vous avoir auprès de moi ! Et moi qui croyais qu’on m’avait envoyé la plus jolie servante pour me réconforter après mon long voyage…mais cela n’enlève rien à votre charme….dites-moi en plus, et venez, asseyons-nous, nous serons plus à l’aise pour causer.
Il lui avait déjà saisi le bras et l’entraînait vers la méridienne. Elle se dégagea vivement.
Li : Ma maîtresse est très préoccupée ! Il en va de l’avenir de l’Empire ! Vous devriez aller lui parler au plus vite.
Gomez éclata de rire.
Go : Que t’a-t-elle donc raconté ? En tout cas, elle t’a bien dressée !
Li : Je n’ai pas besoin de ses conseils, je sais prendre soin de ma vertu toute seule !
Go : De ta vertu ! Tu es décidément bien fière pour une soubrette. Elle n’aurait pu mieux choisir, une chatte sauvage pour servir une panthère !
Li : Surveillez vos paroles, monsieur !
Go : Sais-tu, belle enfant, que tu t’adresses à quelqu’un qui peut te faire envoyer au cachot aussi facilement qu’il boit une tasse de café ? Mais je n’aime pas boire seul, aussi je te propose de partager cette tasse avec moi. Tu peux t’assoir sur le fauteuil, je garde la méridienne.
Li : Je n’ai apporté qu’une seule tasse.
Go : Prends-la, je vais me servir un verre de vin. Tiens, la place est libre.
Il enleva le manteau du fauteuil et le jeta sur la méridienne, puis tendit la tasse à Liselotte. Elle la prit sans hésiter et se recula lentement pour s’assoir. Il la regarda faire, l’air satisfait, puis se servit son verre et s’allongea à nouveau à demi sur la méridienne.
Go : Bien, parlons choses sérieuses.
C’était donc là l’homme qui avait ses entrées chez l’Empereur, partageait avec lui des secrets de la plus haute importance ! Sa désinvolture stupéfiait Liselotte. Mais il avait eu l’intelligence de la prendre au sérieux, du moins l’espérait-elle. Ses derniers mots étaient une invitation évidente.
Li : Madame vous a vu entrer chez l’Empereur et est très contrariée de ne pas être au courant du motif de votre venue. Elle semble penser qu’elle a le droit de l’être. Je ne sais pour ma part ce qu’il en est, mais elle m’a demandé de me renseigner sur vous, dans l’espoir de s’entretenir avec vous, je suppose.
Go : Elle ne t’a donné aucun message pour moi ?
Li : Non, c’est-à-dire que ….je devais seulement…
Go : Dire que j’ai failli ne pas avoir plaisir de faire ta connaissance, chère….
Li : Vous savez tout, à présent il faut que je me retire, elle m’attend. Que dois-je lui dire ? Irez-vous lui parler ?
Elle s’était levée, ce qui fit à nouveau sourire Gomez. Il but une gorgée de vin, laissant la jeune femme faire mine de partir.
Go : Je vous comprends…votre mission…votre réputation…votre vertu….donner son nom, c’est déjà capituler, c’est un aveu de faiblesse….
Li : Vous n’obtiendrez rien de moi !
Go : Qui vous dit que je veux quelque chose ? Vous connaissez mon nom, il n’est gère poli que je ne puisse m’adresser à vous de manière appropriée, ne trouvez-vous pas, chère…
Li : Mademoiselle.
Go : Je comprends que notre Empereur aime séjourner dans une province où les servantes se font appeler mademoiselle. Eh bien, Mademoiselle, je serais ravi que vous me conduisiez vers votre maîtresse tantôt. Revenez quand elle sera disposée à me recevoir, je ne bougerai pas d’ici. En vous attendant, je ferai honneur aux victuailles que vous m’avez si généreusement apportées, alors que ce n’était pas votre office. Et croyez bien que je suis ravi d’avoir fait la connaissance d’une personne aussi charmante que vous.
Liselotte s’inclina.
Li : Il sera fait selon vos ordres. Veuillez m’excuser pour mon impertinence.
Go : Je ne vous en tiens nulle rigueur. Je suis fort heureux que mon séjour débute de façon si plaisante.
Dès qu’elle eut quitté la pièce, Gomez se servit encore un verre, puis deux. Il savait qu’il devait garder les idées claires, mais il avait besoin d’un remontant. La panique le gagnait. Il posa brusquement son vin, dans un effort désespéré pour retrouver son sang-froid. En venant ici, il n’avait nullement prévu qu’il devrait donner des explications à Isabella. S’il soupçonnait la possibilité qu’elle ait trouvé refuge auprès de Charles Quint, il n’en avait aucune certitude avant de quitter l’Espagne, et il avait cru se prémunir contre une hypothétique rencontre en se présentant à l’aube. Comment avait-elle su ? Comment l’avait-elle surpris entrant dans les appartements de l’empereur ? Ce dernier ne lui avait rien dit de son entretien, apparemment, et c’était fort heureux. A moins que ça ne soit un piège, et qu’Isabella ait l’intention de le sonder pour voir s’il n’avait pas caché quelque chose au souverain. Non, c’était impossible, comment pouvait-elle savoir que…Il avait pris toutes les précautions, il en était certain ! En tout cas, si l’empereur envoyait Isabella pour l’espionner, c’était qu’il se doutait de quelque chose, mais jusqu’à quel point ? Dans ce genre d’affaire, mieux valait jouer les innocents, tout en supposant que vos adversaires en savaient malgré tout plus qu’ils n’auraient dû. La cachette était sûre, mais si cette servante s’avisait de revenir ? De fouiller la chambre pendant son entretien avec Isabella ? Non, ses alarmes étaient ridicules, cette fille était une débutante, c’était évident. Et personne ne pouvait déjà être au courant, il avait avalé quasiment d’une traite le trajet jusqu’à Bruxelles. Personne ne pouvait non plus le soupçonner, il avait toujours servi loyalement la couronne, enfin, à sa manière… Mais il valait mieux qu’il s’arrange pour emporter tout son trésor avec lui, puisqu’il ne pouvait décemment pas exiger d’Isabella qu’elle se déplace elle-même pour lui rendre visite. Peste soit de la galanterie !
Re: FANFICTION COLLECTIVE : Tome 2
Posté : 08 avr. 2022, 19:28
par TEEGER59
Gomez est toujours aussi tête à claques.
Je le hais! Je le hais! Je le hais!
Re: FANFICTION COLLECTIVE : Tome 2
Posté : 09 avr. 2022, 14:17
par nonoko
TEEGER59 a écrit : 08 avr. 2022, 19:28
Gomez est toujours aussi tête à claques.
Je le hais!
Je le hais! Je le hais!
Il y a des personnages qu'on aime haïr...

Re: FANFICTION COLLECTIVE : Tome 2
Posté : 09 avr. 2022, 14:19
par nonoko
Allez, encore un petit carré pour le week-end, le chapitre sera fini en 8 parties, il faut déguster en prenant son temps!
Partie 4.
Quelques heures plus tard, Isabella se promenait dans le parc du château en compagnie de Gomez. Le soleil d’automne commençait à décliner. Vaincue par la fatigue, elle n’avait pas résisté au sommeil avant le retour de Liselotte, et cette dernière avait impatiemment attendu son réveil, partagée entre l’envie de raconter son exploit, et la crainte de déplaire. Elle avait longuement préparé sa défense, inutilement. Isabella était trop mécontente contre elle-même de s’être endormie, pour songer à s’emporter contre Liselotte, et ne la félicita pas non plus. La déception fut rude, mais la servante se consola quand sa maîtresse l’envoya avertir Gomez de la retrouver dans le parc. Si elle ne la félicitait pas pour son initiative, elle avait malgré tout besoin d’elle comme intermédiaire. Elle ne se doutait pas qu’Isabella profitait des minutes qui la séparaient de l’entrevue pour faire prévenir l’empereur et le chef de la garde de ce qu’elle faisait. Elle s’était ensuite postée bien en vue près de la fontaine du premier parterre. Elle avait eu tout le temps de l’observer tandis qu’il s’approchait, cherchant à déceler dans sa démarche, son attitude, quelque indice de son état d’esprit. Elle en avait conclu qu’il n’était pas tranquille. Une chose l’intriguait surtout, une légère boiterie qu’elle n’avait jamais remarquée auparavant. Elle le trouva aussi particulièrement engoncé dans son manteau, et il lui parut se pencher en avant avec une raideur inhabituelle pour la saluer. Elle décida de lui en faire tout de suite la remarque.
I : Je suis désolée de vous faire sortir si tard, la fraîcheur est bien vive, mais j’aime à me promener aux derniers rayons du soleil, en solitaire.
Go : Cela ne me dérange pas, au contraire, nous serons plus à l’aise pour parler.
I : Mais votre long voyage semble vous avoir épuisé, et je crains que vous ne soyez tout à fait remis de votre fatigue.
Go : Vous plaisantez ? J’ai mangé, bu et dormi plus que nécessaire en attendant de vos nouvelles, et me voilà tout disposé à satisfaire votre curiosité !
I : Etes-vous sûr ? J’ai cru remarquer que vous boitiez un peu.
Go : Oh ? L’humidité de ce pays, sans doute, ma jambe semble y être sensible. A moins que je ne sois descendu un peu trop vivement de cheval ce matin.
I : Vous étiez pressé d’arriver, je suppose…
Go : Bien sûr ! On l’est toujours quand il s’agit de porter des nouvelles à l’empereur ! Si j’avais su que vous étiez là également, je n’aurais pas manqué de vous rendre visite, mais j’avais cru comprendre que vous iriez avec vos amis…
I : J’ai décidé de rester encore un peu en Europe. Je n’avais pas envie de les embarrasser de ma présence, et puis, je me suis dit que je pourrais apprendre quelque chose, d’une façon ou d’une autre. Mais mon séjour jusqu’à présent a été bien morne, et l’empereur me tient à l’écart de ses affaires, alors que je lui ai fourni plusieurs renseignements, et conseillé de redoubler d’attention dans sa surveillance du Prince, en lui décrivant nos ennemis, leur mode opératoire…et j’ignorais qu’il vous avait mandé pour lui faire un rapport. Je sais qu’il reçoit régulièrement des courriers de son ancien secrétaire, Gonzalo Pérez, qui est maintenant le secrétaire particulier de Philippe. Jusqu’à présent, je pensais que ces courriers ne contenaient rien d’important, du moins c’est ce qu’il m’a laissé entendre.
Go : Eh bien, disons que je me suis permis d’intervenir à titre personnel…quant aux courriers de Gonzalo Pérez, ils ne contenaient pas la vérité.
I : Tiens donc…qu’avez-vous découvert de si important pour venir vous-même en référer à l’empereur ? Un courrier n’aurait pas suffi ?
Go : Ne vous moquez pas ! Mettriez-vous en doute la gravité de la situation ?
I : L’empereur ne m’a pas paru particulièrement alarmé ce matin.
Go : Dites plutôt qu’il n’a pas voulu vous alarmer !
I : Expliquez-vous alors.
Go : Je vois bien qu’il le faut…mais je compte sur votre discrétion. Voyez-vous, j’ai omis certains détails dans mon rapport ce matin.
I : Le rapport que vous avez fait à l’empereur n’était donc que le prétexte de votre venue.
Go : Vous êtes redoutable !
I : Non, c’est vous qui tournez autour du pot sans savoir comment vous allez vous en sortir. Je vous croyais plus fin.
Go : Si nous marchions un peu ? A rester ainsi debout, je crains que vous ne preniez froid.
Isabella acquiesça. Ils s’éloignèrent du château en direction des bosquets. La démarche de Gomez était toujours aussi raide, et il semblait boiter davantage. La jeune femme se demanda s’il ne le faisait pas exprès, ou s’il ne cherchait plus à dissimuler sa boiterie maintenant qu’elle l’avait remarquée. Elle ne se rappelait pas l’avoir vu boiter le matin, mais elle était loin, le jour pointait à peine. Il rompit brusquement le silence qui s’était installé.
Go : Votre frère a été agressé. Une blessure légère. Mais il ne se remet pas comme prévu, il est tombé malade depuis, peut-être à cause de cette blessure.
Elle ne manifesta aucune émotion particulière. Croyait-il vraiment que ce genre de nouvelle l’intéressait ? Toutefois, l’annonce de la maladie piqua sa curiosité.
I : Vous soupçonnez un empoisonnement ?
Go : En quelque sorte….et je n’ai pas envie de subir le même sort.
Elle le laissait patiemment livrer ses informations par bribes, consciente qu’il tentait de jouer avec ses nerfs.
I : Vous avez donc fui.
Go : Cela vous paraît lâche…les symptômes dont souffrent votre frère n’ont rien de plaisant, voyez-vous.
I : Ils n’ont pas l’air si graves, puisqu’il n’est pas mort, à moins qu’il ne le soit à l’heure où nous parlons.
Go : Je ne le crois pas, les médecins n’ont pu se prononcer avec certitude quant à l’issue, ils semblaient penser que le mal progresserait avec lenteur, entraînant une déchéance, pendant des mois, voire plus.
I : Je lui souhaite dans ce cas de mourir le plus rapidement possible. Vous savez que je ne le regretterai pas, pourquoi me raconter cela ? Ce serait une vengeance ?
Go : De nos ennemis, oui, j’en suis quasiment sûr. Ce Gonzales, ou Garrido, peu importe, est peut-être mort, et je n’ai trouvé aucune trace de sa mère, mais j’ai découvert qu’il y avait encore un membre de la famille à Barcelone, le père.
Elle constata avec déplaisir que l’annonce de l’hypothétique mort de Gonzales ne la laissait pas indifférente. Elle se revit dans la taverne, le jour où le jeune métis lui avait fait le récit de sa vie.
I : Je sais, il m’avait raconté son histoire. Son père avait abandonné sa mère pour partir aux Amériques, en l’emmenant avec lui. Ils s’étaient brouillés au retour.
Go : C’est apparemment le cas, effectivement. Je ne sais pas ce qu’il est advenu de cette Hava quand ils sont partis, sa dernière trace m’a mené à un de ces établissement peu fréquentable des bas-fonds de Barcelone qu’aime à fréquenter votre frère. Il est même probable qu’il ait rencontré cette femme. Quant au père, il a chassé son fils, une histoire de rivalité amoureuse si on en croit les indiscrétions des voisins. J’ai fait surveiller sa maison, et je n’ai remarqué aucune visite suspecte. Par contre, je n’étais pas le seul à la faire surveiller. Impossible pourtant de remonter à la source, ceux qui ont intérêt à surveiller les agissements du père sont encore plus habiles que moi.
I : Hava…
Elle n’avait jamais songé à elle comme une femme abandonnée, trahie, comme si le récit de Gonzales ne correspondait pas à la réalité. Gomez venait de la confronter à cette réalité, et elle en fut contrariée. Elle chassa vite la pensée que cette femme ait pu subir quoi que ce soit de la part de son frère.
Go : C’est fort probable. Son mari a encore un jeune fils. Peut-être veut-elle s’en prendre à lui ? Je n’ai pas voulu attendre toutefois pour vérifier si cette hypothèse est juste.
I : Roberto s’est fait agresser entre temps…
Go : Exactement. Et le père aussi. Légère blessure, là encore, à quelques pas de chez lui. Puis des symptômes similaires à ceux de votre frère. Cette femme semble avoir le goût de la vengeance, si vous voulez mon avis.
Se vengeait-elle de ce que lui avaient fait subir ces deux hommes, Roberto et son mari ? Elle se souvint que Gonzales lui avait raconté que son père s’était remarié aux Amériques et qu’il avait eu un enfant de sa deuxième femme. Chassée, remplacée, violentée, elle avait des raisons de vouloir se venger ! L’idée qu’Hava pouvait être une victime révolta Isabella. Pourquoi Gomez lui racontait-il tout cela ?
I : Tout cela relève de la vengeance personnelle, cela n’a rien à voir avec nous ! Avec l’empereur !
Go : Vous concevez pourtant qu’elle puisse s’en prendre à moi pour avoir gêné les manœuvres de son fils, et peut-être provoqué sa mort.
I : Ce sont vos problèmes ! Si je me souviens bien, vous n’avez été guidé dans cette affaire que par votre propre intérêt, et un esprit de revanche !
Go : Je reconnais que je n’ai pas apprécié que Gonzales me double auprès de Philippe, avec ses manigances pour se mettre le prince dans la poche, en lui faisant miroiter un équipement militaire qui lui permettrait de mettre fin aux guerres menées par l’Empereur, trop coûteuses à son goût, peu efficaces. L’Empereur ne veut pas en entendre parler, mais s’il s’avère que son fils a raison et a fait le bon choix, Philippe pourra arguer de sa victoire pour prendre le pouvoir plus tôt. Il ronge son frein en attendant que son père officialise son titre de Duc de Milan, il en a assez d’être assisté par un conseil de régence sans pouvoir décider seul des affaires de l’Espagne. Malgré toute l’admiration qu’il a pour son précepteur et conseiller Juan de Zuniga, l’ami de son père, il aimerait voler de ses propres ailes.
I : Je suis au courant ! Vous aviez vous-même l’intention de favoriser les projets de Philippe, et comme il vous a préféré quelqu’un de plus compétent, vous essayez de rentrer en grâce auprès de l’empereur en espionnant son fils. C’est pathétique. Mais cela ne m’apprend rien.
Gomez perçut l’irritation de son interlocutrice, qui s’arrêta brusquement. Elle se campa face à lui, bras croisés. Il avait assez joué.
Go : On lui a livré un prototype de ces fameuses machines de guerre à carapace. En parfait état de marche. Vous vous doutez bien de qui il peut s’agir.
Prudemment, il avait décidé de ne plus prononcer le nom d’Hava ou de Gonzales.
I : Voilà donc ce que vous êtes venu annoncer à l’empereur.
G : Oui. Et ni Juan de Zuniga, ni aucun des autres membres du conseil de régence ne sont au courant. Seul Gonzalo Pérez l’est. Et il n’en a rien dit.
I : Un problème de courrier ?
Go : Même s’il se décide à informer l’empereur, cela ne change rien au fait que ce soit un traître. C’est lui qui a organisé la transaction. Il aura du mal à cacher sa responsabilité ou à se disculper.
I : Vous avez une preuve ? Charles Quint lui fait toute confiance, et l’a justement chargé de surveiller son fils….
Go : Quelqu’un le fait chanter. Certaines rumeurs l’accusent d’avoir conçu son fils Antonio alors qu’il avait déjà été ordonné prêtre. On dit aussi qu’Antonio serait le fils du Prince d’Eboli, qui lui aurait demandé d’endosser cette paternité pour éviter à son fils d’être un bâtard. D’autres racontent que Pérez ne serait pas de sang pur, que c’est un descendant de marranes. On n’apprécie pas qu’un descendant de juifs convertis soit aussi proche du pouvoir. Charles Quint n’a jamais ajouté foi à ces rumeurs, et lui accorde toute sa confiance, car il pense que ce n’est que par pure jalousie que certains veulent nuire à la réputation de cet homme, qui soutient sa vision de l’Empire et pense que l’ennemi principal, ce sont les princes protestants, pas Soliman le Magnifique. Moi, je parie qu’une de ces rumeurs est vraie. Quelqu’un sait laquelle, a des preuves et fait pression sur lui. Philippe ne peut rien dépenser sans que le conseil de régence soit au courant, or il a payé pour recevoir le prototype. J’ai des témoins qui affirment avoir été payés pour accompagner Philippe et son secrétaire lors de la réception du prototype.
I : Comment peuvent-ils être sûrs qu’il s’agissait du Prince et de son secrétaire ? Je trouve Philippe bien imprudent de s’exposer ainsi.
Go : Il doit jouer serré, ou les membres du conseil seront au courant.
I : S’ils ne le sont pas déjà, ce sont des imbéciles.
Go : Ne sous-estimez pas Philippe, ni Pérez. Et ne me sous-estimez pas non plus. D’après la description faite par mes témoins, et la façon dont les deux hommes se sont adressés l’un à l’autre, il ne peut s’agir que d’eux, malgré tous leurs efforts pour dissimuler leur identité. N’oubliez pas que j’ai servi Philippe, et qu’il a appris de moi quelques ruses.
I : Tout repose donc sur votre expertise et vos témoins…c’est un peu léger. Et comment Philippe a-t-il trouvé de quoi payer le prototype, et soudoyer les hommes qui l’accompagnaient ? Vous savez bien qu’il n’est pas libre de ses dépenses. Et vous-même, comment avez-vous fait ?
Go : Eh eh, j’ai toujours ma petite réserve…le commerce des médaillons est très lucratif… Pérez, en tant que secrétaire particulier de Philippe, s’est débrouillé pour lui trouver la somme, mais il n’a pas été très discret : j’ai pu le prendre en filature sans qu’il me remarque jusqu’à la boutique d’un joailler. Je le soupçonne d’avoir vendu quelques bijoux, mais je ne sais lesquels : je comptais rendre une visite discrète après la fermeture au joailler en question, histoire de le cuisiner un peu à ma façon, en toute tranquillité, mais la boutique avait été incendiée et le brave homme avait péri avec toute sa famille. Bien sûr, les coupables ont tout emporté avant de mettre le feu.
I : Hava….
Go : C’est fort probable, et c’est très malin : ainsi ils ont l’or et les bijoux !
I : Pérez aurait pu donner les bijoux directement.
Go : Sans doute une exigence de ces bandits, histoire de ne pas s’embarrasser à revendre les bijoux.
I : Bon, si je résume, l’empereur sait que son fils lui a désobéi, que son secrétaire est de mèche, et il garde son sang-froid. Vous a-t-il dit ce qu’il allait faire ?
Go : Mettre au courant le conseil, bien entendu. Ainsi Philippe ne pourra plus rien faire, et tant pis pour Pérez.
I : Vous allez porter le courrier ?
Go : J’ai laissé entendre à sa majesté que ce n’était pas très prudent. J’ai pu être suivi, on a pu découvrir que j’espionnais les affaires de Philippe, malgré mes précautions. Il vaut mieux que je disparaisse quelque temps, d’autant plus que je n’ai pas envie de subir le sort de votre frère.
I : Vous pourriez profiter de l’hospitalité de Charles Quint.
Go : Je préfère agir selon mes méthodes. Je suis une proie trop facile ici. On ne peut compter sur personne. Tenez, votre servante, qui décide de se mêler de ce qui ne la regarde pas….
I : Si vous ne faites confiance à personne, quel crédit dois-je accorder à vos informations ?
Go : Vous vouliez savoir, vous savez. Charles Quint confirmera mes dires, bien entendu, à part ce que je vous ai raconté sur Hava, Roberto et le père de Gonzales.
I : Vous avez dit que cette femme était animée par la vengeance. Mais quel intérêt a-t-elle à fournir des machines de guerre à Philippe et à lui extorquer de l’argent ?
Go : Bah, elle doit avoir ses raisons, et ce n’est pas mon affaire. Je crois en avoir assez fait pour mon pays. A vous de creuser plus avant, si cela vous inquiète tant. Mais si vous voulez mon avis, j’éviterais de chercher à croiser à nouveau la route de ces criminels.
I : J’ai bien peur de ne pas pouvoir choisir…