Alors sinon, je viens de repenser à deux lieux (par ailleurs diamétralement opposés en termes de points cardinaux) qui pourraient être évoqués si l'on passe (ce qui est probable) par le continent africain.
- 1) À l'est, Barara, la ville fantôme d'Éthiopie
L'Éthiopie aurait, en effet, une capitale perdue. C'est en tout cas ce que l'on pourrait croire si l'on se fie au planisphère du moine italien Fra Mauro. Cette carte, qui date de 1450 (et, soit dit au passage, qui est conservée à la bibliothèque nationale Marciana de Venise) compte parmi les représentations du monde les plus précises et les plus fidèles de son temps. Or, sur cette carte, à l'emplacement de l'actuelle Éthiopie, figurent plusieurs villes qui ont ensuite disparu des cartes plus récentes. Et parmi lesdites villes se trouve Barara, la plus étendue de toutes. Elle a même l'honneur d'être illustrée d'une enluminure représentant un immense château accompagné de la mention "capitale de Prester John" (ce qui veut bien évidemment dire "Prêtre Jean", soit le nom que les Européens donnaient à tous les rois d'Éthiopie).
Pas très précis, me direz-vous. Mais selon les témoignages écrits de moines éthiopiens, il s'agirait de l'empereur Zara Yaqob (littéralement "semence de Jacob, que l'on peut, par extension, traduire par "graine de Dieu"). Au début des années 1430, Zara Yaqob a fait de Barara sa capitale. Un siècle plus tard, en l'an 1530 (et c'est là que ça devient intéressant pour nous du point de vue des MCO), les troupes musulmanes d'Ahmed Ibn Ibrahim prennent la ville et la mettent à sac, notamment son église somptueuse, remplie de mobilier richement décoré. Et Barara ne s'en serait jamais remise...
Si l'on décide de se fier à la carte de Fra Mauro, Barara sommeille quelque part au nord-ouest de la rivière Awash et au nord d'Addis-Abeba, l'actuelle capitale.
- 2) Beaucoup plus à l'ouest, Yani', la capitale évaporée du royaume du Mali
Au XVème siècle, comme on le sait, l'Empire du Mali ou Empire Mandingue (alors situé à cheval sur le nord de la Guinée et le sud-ouest de l'actuel Mali) était l'un des plus puissants États du continent africain. On sait qu'une à deux fois par an, de grandes caravanes chargées d'or le quittaient pour se rendre au Maghreb, où le précieux métal jaune était échangé contre des ballots d'étoffes, des barres de sel et sacs de cauris (les petits coquillages qui servaient, à cette époque, de monnaie, et que l'on retrouve, encore aujourd'hui, utilisés dans de nombreuses formes d'art africain).
Pourtant, malgré sa richesse apparente, la capitale de ce royaume semble s'être tout bonnement volatilisée. Histoire de faciliter les choses, les seules sources écrites dont nous disposons sont les récits de voyageurs ayant traversé la région et ils ont tous donné un nom différent à cette capitale: Bini, Butî, Tatî, Yity, etc... La liste est longue ! Parmi ces différents noms, on trouve celui de Yani', ce qui pourrait faire penser au village de Niani, dans l'actuelle Guinée. Ce village est de surcroît situé près d'un cours d'eau, le Sankari, qui pourrait être le "Sansara", qu'un autre voyageur dit avoir traversé pour se rendre à la capitale.
Mais sur place, on n'a retrouvé que les restes d'une muraille, d'une mosquée et des fragments de poterie. Aucune trace du palais royal, de ses arabesques, et j'en passe... Pire, les datations au carbone 14 indiquent que le site a été occupé avant le XIVème siècle, après le XIVème siècle mais pas pendant.
Et accessoirement, tant que j'y suis, je croise très très fort les doigts pour que soit évoquée, si l'on se rend bien en Afrique aux côtés de nos personnages préférés, la question de la traite négrière et du commerce des esclaves.