"Sa Machine Ailée" et autres histoires

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Re: (Fanfiction) Sa Machine Ailée

Message par Sandentwins »

Akaroizis a écrit : 23 juil. 2019, 17:35 À quand le mariage ? :lol:
Ca, je le garde pour une autre fanfiction ;)
:condor: Le meilleur personnage de toute la série, c'est la mère d'Esteban.:condor:

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Re: (Fanfiction) Sa Machine Ailée

Message par Sandentwins »

:condor: Chapitre 8: Pistes :condor:

« Arrête, tu sais- tu sais bien que j'en ai pas besoin! »

Et alors? Tu peux pas prendre soin de toi sous cette forme, donc tu dois nous laisser t'aider!

« Noooooon!!! »

Mais rien n'y fit. Malgré ses supplications, le chiffon mouillé frotta son tableau de bord, couinant à mesure que Tao passait entre ses lumières et boutons.

« Tu t'en sortiras pas aussi facilement! », se plaignit Esteban, comme un prisonnier qu'on menait sur l'échafaud. « Je vais t'écraser, te réduire en miettes!! »

Pour peu que t'arrives à bouger les pieds.

Se faire nettoyer le cockpit n'était pas si mal, en fait. Il sentait tout juste l'air se rafraîchir dans son cou. Mais ce qu'il détestait par dessus tout, c'était l'attitude supérieure de Tao, quand il lui récurait les commandes comme s'il toilettait un chien ou donnait le bain à un bébé. Il se sentait si vulnérable! Mais tout ce qu'il pouvait faire, c'était se tenir là et subir.

Crois-moi, t'en as bien besoin. C'est quand, la dernière fois que t'as nettoyé le Condor? Il y a de la poussière plein les joints!

« Il a traîné des années dans le temple du volcan, bien sûr qu'il y a de la poussière. »

Plus maintenant.

Un autre seau d'eau de mer l'éclaboussa, et il aurait frissonné s'il avait encore sa peau. Argh, mais qu'est-ce qui lui avait pris d'atterrir près de la côte?

Tu devrais me remercier. Je prends un meilleur soin du Condor que tu ne l'as jamais fait!

« Ne commence pas là dessus, sinon je te fais tomber. »

Oh, fais pas ton gros dur. Je sais bien que tu n'oserais pas, car tu sais que mes talents de nettoyage sont sans pareil!

« T'y vas trop fort sur le brossage...et où est Zia? Elle n'est plus avec toi?

Partie chercher du bois. Mendoza est avec des pêcheurs, ils ont cru voir la nef l'autre jour. Pedro et Sancho essayent de pêcher des anguilles...eeeet c'est raté.

En effet, quelque chose tomba dans l'eau juste à côté, et des voix pestèrent. Esteban regarda autour, prenant le soleil sur ses ailes.

« Je croyais que seule Zia pouvait m'entendre. »

On le pensait tous. Et puis, j'ai commencé à t'entendre aussi.

Esteban ne savait pas vraiment qu'en penser.

Hé, ça veut peut-être dire que moi aussi, je développe mes pouvoirs! C'est pas génial, dis?

« Sans doute? Ça ne m'étonnerait pas s'il s'avère que tu peux...parler à l'orichalque, ou quelque chose dans le genre. »

C'est tout naturel. Il fallait bien que j'aie des pouvoirs, moi aussi! C'est normal que ça m'arrive enfin.

« Je suis peut-être un Condor géant, mais de nous deux, c'est pas moi qui a la plus grosse tête. »

Il sentit une autre volée d'eau s'abattre sur son tableau de bord, ce à quoi il répondit par un sourire narquois implicite.

Le signal sonna dans son esprit, et il baissa la tête. L'eau coula de son bec lorsqu'il l'ouvrit, éclaboussant presque Zia. Elle se recula rapidement, laissant la saumure s'évacuer avant d'entrer.

« Salut, Zia! J'espère que le temps est bon, dehors. »

En effet, merci. Eh bien, regarde-moi cet éclat! Je m'y vois comme dans un miroir.

« Remercie Tao pour ses prouesses de nettoyage. Il a enfin trouvé son rôle à jouer en tant que brosseur. »

En effet! Heu- attends, t'insinues quoi, là?

Zia eut un petit rire à cette pique, s'asseyant.

Décidément, vous changerez jamais.

« Crois-moi, c'est pas toujours bon de changer. »

Il voulait juste rire un peu de lui-même, mais il sentit que ses amis n'y étaient pas très réceptifs.

« ...sinon, c'est quoi le plan, maintenant que je suis tout propre? »

Ça les réveilla de leur silence.

On continue vers le sud. Pour l'instant, tout ce qu'on peut faire, c'est suivre Ambrosius.

« Et après? On...on le provoque en duel? » 

Je ne sais pas. Si Mendoza a un plan, il ne veut pas le dire.

Mais on n'a pas d'autres options, donc autant faire ce qu'il dit.


« C'est vraiment une tuile. On y était presque! Si on n'avait pas eu ce contretemps, on serait en route pour la cinquième Cité, en ce moment! »

Il sentit ses amis s'inquiéter, et poser les mains sur son tableau de bord.

Ne dis pas ça, Esteban. On ne pouvait pas savoir.

Exact. T'as pas choisi de-


Zia le fusilla du regard.

...t'as pas choisi. Ce n'est pas ta faute.

L'était-ce vraiment? Il tenta de se rappeler de ce qui s'était passé ce jour-là, il y a plusieurs semaines. Ce qui s'est passé...la dernière chose de sa mémoire d'enfant de chair, d'os et de sang. C'était si flou, comme un souvenir très lointain, et il n'en retrouva que des fragments de sensations volages.

Il se souvint d'un vent fort, qui lui fouettait au visage. D'un éclat aveuglant, qui le désorientait. D'un bruit tonnant, comme un coup de feu porté par l'écho d'une grotte. Du sol agité qui se dérobait sous ses pas. De son sang qui ne fit qu'un tour, deux tours, dix tours, avant de ne plus en faire du tout.

Il se souvint des ténèbres, de cette sensation étouffante de perte de contrôle, se serrement tout autour de lui; il se voyait, muet, terrorisé, désespéré, appeler à l'aide.

« Non. », finit-il par dire. « Ce...ce n'était pas ma faute. »

Il rouvrit le bec, pour laisser partir ses amis après ce dialogue des plus déprimants.

« Allez rejoindre les autres. Je vous attends ici. »

On ne sera pas longs. Fais attention.

« T'en fais pas...je vais juste prendre un peu d'exercice. »

T'as plus de muscles, pourtant, non?

« Je vois pas en quoi ça me gênerait. »

Il les laissa sortir et s'éloigne. Puis il décolla lentement de sa propre initiative, déployant ses ailes et partant pour un petit vol autour de la côte. Rien de mieux que la vitesse pour se sécher, après tout! De plus, il n'aimait pas rester à ne rien faire alors que tout le monde mangeait, donc autant se faire un petit « casse-croûte » de soleil...ne serait-ce que pour se sentir faire partie du groupe.

Il n'aimait pas vraiment ça, mais il se disait que ça pouvait toujours être pire. Au moins ses amis étaient avec lui, et ne l'avaient pas abandonné. Il devrait juste vivre avec le fait qu'il était désormais un gigantesque oiseau d'orichalque. Il l'avait accepté, depuis le temps...mais quand même, par moments il s'en sentait bizarre. C'était pas aussi facile à avaler comme changement qu'une nouvelle chemise ou une coupe de cheveux! Bien que personne n'ose ne le lui dire en face, il se doutait bien que les autres trouvaient ça bizarre, plus encore que lui-même. Il n'avait pas à se demander ce qu'ils chuchotaient sur lui derrière son dos métallique.

Mais il avait l'habitude. Il a entendu assez de murmures et de rumeurs dans sa jeunesse à Barcelone, de voix et de chuchotement qui répétaient encore et encore les mêmes paroles de fils du soleil, des voix qui l'ont suivi bien au-delà de l'Espagne. Elles l'ont suivi jusqu'au Vieux Pic, jusqu'au pays des Amazones, et même jusqu'à la Cité de Tseila, comme un souvenir implacable de sa condition et de son pouvoir bizarre. Et il n'en a jamais rien dit, car ça n'aurait servi à rien. Il s'est résigné à voir ces rumeurs lui coller à la peau et le séparer du reste du monde, même parmi ses amis, sans qu'il n'y puisse rien. Il s'est résigné à ce que les autres chuchotent quand il avait le dos tourné, et à ne pas pouvoir les en dissuader.

Et alors, si ses propres amis se mettaient à dire du mal de lui et de sa condition? Au moins, il n'était pas là pour les entendre. Qu'ils l'appellent par toutes sortent de noms s'ils voulaient, qu'ils le traitent de bizarre, qu'ils le pleurent s'ils voulaient tant. Il s'en fichait bien, car il était loin au dessus d'eux, là où leurs pensées venimeuses ne l'atteindraient jamais.

...

Mais qu'est-ce qu'il disait, enfin? Il volait certes haut, mais s'il se mettait à penser de telles méchancetés de ses amis, alors il tombait bien bas! Ce n'était pas son genre d'être méfiant et paranoïaque envers Tao et Zia, et ce qu'ils pensaient de lui. Ça venait d'où, ces pensées? C'était mal de se dire de telles choses. Il avait confiance en ses amis, car il croyait en eux, en sa famille. Jamais ils ne médiraient dans son dos. Ils n'étaient pas comme les Espagnols ou les superstitieux: ils étaient les meilleurs.

Il se releva de son vol passif ventre à l'air, et redescendit lentement vers ses amis. Ils devraient repartir au plus vite, et faire le plus de chemin avant la nuit. Peut-être même qu'il pourrait les aider au sol! Les idées de Tao sur un corps plus petit qu'il pourrait posséder n'étaient pour le moment que des théories, mais elles l'intéressaient. Comme il avait hâte de sentir à nouveau le sol sous ses pieds, malgré l'excitation du vol!

Alors qu'il se préparait à atterrir, il se sentit soudainement pris de vertiges. Il perdit le contrôle pendant un temps et tomba presque à terre, mais se stabilisa et parvint à se poser. Les autres accoururent vers lui, et il pensa à ouvrir son bec malgré la confusion.

Esteban! Est-ce que tout va bien?

« Je...je crois, oui. »

Il tenta de se remettre de ses troubles. S'il avait encore sa poitrine, il aurait prit une grande inspiration.

Esteban, qu'est-ce qui se passe? On dirait que tu as perdu le contrôle.

« Tout va bien. J'ai juste...senti quelque chose de bizarre. »

Bizarre? Et c'est une bonne ou une mauvaise nouvelle, ça?

Il ne savait pas quoi répondre. Il releva la tête une fois tout le monde à bord, et se concentra.

« C'est...c'est un signal! Je le sens, maintenant, c'est un signal! »

Quel genre de signal?

« Je ne sais pas, mais...ça me rappelle la fois où le Condor était attiré par la Perle de Cristal! Il y a quelque chose, et je sais où le trouver! »

C'est peut-être le chemin d'une nouvelle Cité?

On...on n'a...on n'a rien à perdre en le sui...suivant, p-pas vrai?

Restons prudents. On ne peut pas faire un tel détour et laisser notre ennemi prendre l'avantage!


« C'est différent. C'est...je ne sais pas comment l'expliquer, mais c'est comme si je...comme s'il fallait que j'y aille. C'est pas loin, je le sais, il faut juste... »

Il n'arrivait pas à s'expliquer, et en ressentait une profonde frustration. Un moment plus tard, il sentit la main de Mendoza se poser sur son tableau de bord.

D'accord. Si tu penses que c'est le bon chemin, nous le suivrons.

« Tu en es sûr? »

Je te fais confiance.

Si Esteban avait encore son cou, il aurait hoché la tête avec détermination.

« D'accord. Alors je décolle! »

Il remplit son corps d'énergie, replia ses jambes, et força sur sa queue jusqu'à se retrouver dans les nuages.

Il s'approchait. Il n'avait aucune idée de quoi, mais il trouverait bientôt.

~~~~~

« Allez-vous enfin vous décider à me dire ce qui se passe? »

Dans le silence du laboratoire, la voix ennuyée de Laguerra sonnait comme le rugissement d'un lion. Mais 'silence' était un bien grand mot, car tout autour d'elle le murmure des ébullitions, le ronronnement des mécaniques et le cliquetis des rouages se faisait entendre, alors que le petit homme s'affairait.

Il allait de soi qu'il n'appréciait pas cette interruption, et la regarda d'un air pincé.

« As-tu trouvé ce que je t'ai demandé? »

« – En effet. Ça va faire une heure que je suis revenue, mais vous étiez trop occupé à faire...ce que vous faites, pour le remarquer. »

Elle pointa du pied le sac par terre, faisant trembler la statuette. Une idole 'empruntée' dans un temple non loin, aussi brillante que l'or mais légère comme de la pierre ponce; un hybride d'homme-faucon de la couleur du soleil, contrastant avec le disque d'onyx qu'il portait sur sa tête.

« Ah, très bien! », se réjouit Ambrosius. « Très, très bien. »

Il l'examina, passa ses doigts sur les fines gravures de l'orichalque sculpté, toujours avec ce sourire connaisseur. Un rictus qui rendait Laguerra perplexe.

« Je ne comprends toujours pas. », fit-elle après un moment. « Pourquoi avons-nous besoin de cette statuette? En quoi va-t-elle nous aider à trouver la prochaine Cité? »

« – En rien, malheureusement. Elle est inutile, désormais, car j'ai eu la bonne idée de passer quelques étapes de notre quête. »

Il la posa avec soin sur sa table de travail, avant de tirer des leviers et de tourner des manivelles dans son assemblage de rouages. Le Luminarion se mit à bouger et à s'ajuster, ses miroirs et lentilles reflétant la lumière du soleil en un fin rayon qui frappa le disque solaire de la statue. Ses yeux de faucon brillèrent, et projetèrent sur le mur de la nef l'image de lignes et de courbes qui auraient pu représenter une carte, à laquelle Ambrosius n'accorda aucune attention.

« C'est étrange. », commenta Laguerra. « Cette carte est incomplète...peut-être faut-il la superposer aux gravures du temple? Ça pourrait marcher! »

« – Pas le temps de résoudre des énigmes. », clama Ambrosius. « Mais porte donc ton attention par ici. »

La statuette brillait maintenant d'un éclat de feu, caractéristique des objets d'orichalque.

« Quel métal spécial. », remarqua-t-il. « Il ne conduit pas très bien la chaleur ou l'électricité, mais il absorbe la lumière et la répand dans sa structure, pour activer toutes sortes de codes et d'instructions cachés au cœur même de ses molécules. »

Il était en train de bidouiller quelque chose. Une sorte de petit pistolet tordu, qui brillait par endroits. Une lueur sombre, menaçante.

« Tant que le soleil brille, la lumière rebondit dans la structure du métal et alimente toutes sortes de choses. Mais que se passerait-il...si la lumière ne passait plus? »

Elle ne répondit que par un silence confus. Il ricana, et tira son arme sur la statuette. Il en sortit un rayon d'énergie sombre, qui toucha l'idole de plein fouet et se répandit sur sa surface. En un rien de temps, la statuette perdit son éclat, et l'or se changea en un brun terne. La lumière du soleil la touchait toujours, mais ne se refléta plus. Laguerra regarda le mur, et vit avec stupéfaction que la carte avait disparu.

« Ça marche! », jubila Ambrosius. « Vois comme la lumière ne se répand plus! Telle est la puissance du rayon noir! »

« – Le...rayon noir? », répéta-t-elle, touchant la statuette avec étonnement. « C'est donc ça, votre nouvelle expérience? D'abord vous voulez savoir comment le Condor peut-il voler seul, et maintenant...vous construisez des armes? »

Le bras de l'idole s'effrita comme un biscuit rassis lorsqu'elle le toucha. L'intérieur était de la même couleur de fruit pourri.

« Oh, je sais où placer mes priorités, ma chère! Si je veux étudier le Grand Condor de près, je dois d'abord le capturer. Et le meilleur moyen d'attraper un oiseau est de lui couper les ailes. »

D'une pichenette, il décapita l'idole, dont la tête se brisa au sol avec un bruit de cailloux. Il n'en resta que de la poussière.

« Bien sûr, il en sera un peu endommagé...mais bon, on ne peut faire d'omelette sans casser quelques œufs. Tant que le cœur et le moteur fonctionnent, je n'ai pas besoin de le faire voler. »

« – Attendez donc une seconde. Je croyais que vous vouliez le capturer? Et maintenant, vous voulez le rendre inutilisable? Je ne comprends vraiment pas votre plan! »

« – Tu verras bien assez tôt. »

Il rangea son arme dans une poche à sa ceinture.

« Mais si ma théorie est correcte...et si les textes anciens disent vrai... »

Son visage se fendit d'un odieux sourire menaçant.

« Alors le secret de la vie éternelle sera bientôt en ma possession. »







dun dun duuuuuuuuuun.
Modifié en dernier par Sandentwins le 24 juil. 2019, 09:05, modifié 1 fois.
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Re: (Fanfiction) Sa Machine Ailée

Message par TEEGER59 »

Les MCO à la sauce "Ghost".
C'est une tournure assez flippante, mais c'est plaisant à lire.
Saqqarah! :D
Les grands esprits se rencontrent car j'en parle également dans ma fic.
:Laguerra: : AH! Comme on se retrouve!
:Mendoza: : Ma première leçon ne t'a pas SUFFIT?
:Laguerra: : Cette fois, tu ne t'en sortiras pas si FACILEMENT!
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Re: (Fanfiction) Sa Machine Ailée

Message par Sandentwins »

TEEGER59 a écrit : 23 juil. 2019, 21:50 Saqqarah! :D
Les grands esprits se rencontrent car j'en parle également dans ma fic.
Tu me montreras ca? J'ai hate de vous lire, j'ai déjà vu pas mal de perles par ici.



:condor: Chapitre 9: Mémoire :condor:

Esteban ne trouvait pas le repos. Mais contrairement à toutes les fois où il voyageait sans repos, cette fois il se posait des questions.

Il se disait qu'il n'aurait plus ni le temps ni l'envie de se poser des questions. Mais alors qu'il volait vers le sud du désert, suivant le signal dans sa tête, les questions et doutes l'envahissaient comme une nuée de moustiques dans un marécage. Il y avait tant de choses qu'il ne savait pas, tant qu'il voulait savoir.

Avant, quand il se posait des questions, il pouvait se tourner vers ses amis. Que ce soit Mendoza et ses conseils d'adulte quant à la vie et aux gens, Zia et sa connaissance des terres et de leurs cultures, Tao et son savoir encyclopédique du peuple de Mu, Sancho et Pedro et leur optimisme bon vivant, il pouvait toujours trouver une réponse à ses doutes. Ils avaient toujours un conseil à lui donner, un détail qui changerait sa perspective, un autre point de vue à adopter. Il y en avait toujours un.

Mais maintenant, rien n'y faisait. Il ne connaissait personne qui pouvait le renseigner sur sa condition. Ses amis ne sauraient pas lui dire ce qui lui arriverait, ou quand ou comment. Il n'y avait personne au monde qui pourrait le rassurer et lui dire qu'il s'y prenait correctement. Pour la première fois de sa vie, il était seul.

Il se demandait si c'était une bonne chose que de suivre cette piste obscure sur un chemin inconnu. Il se demandait s'il faisait les choses de travers. Il se demandait tellement de choses qu'il ne pouvait pas connaître, car si sa transmutation était quoi que ce soit de courant, il en aurait forcément entendu parler.

Mais une fois encore, cette partie de son héritage lui était perdue. Au moins, il aurait toute sa vie pour la redécouvrir.

Le soleil commençait de descendre, donc il se dépêcha pour éviter de se retrouver coincés au milieu de nulle part. Il ne pouvait pas décevoir ses amis. Il n'était certes que leur véhicule, mais c'était lui qui les guidait dans cette course folle, et il devait leur rendre service. Changeant d'angle, il força sur sa queue et fila plus vite, sentant un tremblement le parcourir. Dans le cockpit, Zia s'était réveillée.

Mh...Esteban? On est arrivé?

« Presque. On s'approche. »

Il pouvait voir toutes sortes de structures en dessous, comme une cité. Au loin, au bord du désert, se trouvait un peu de verdure.

Il y a plein de ruines partout. Celles-là ressemblent à un temple. Tu sens quelque chose?

« J'en sais rien...mais je n'ai plus beaucoup d'énergie. Je vais atterrir juste au cas où. »

Il déplia ses jambes, et voleta au dessus des ruines jusqu'à trouver un espace de taille suffisante pour s'y poser, les restes d'une place publique au milieu des débris. Il lui faisait toujours un choc de voir les restes d'une civilisation autrefois grande et glorieuse, qui maintenant gisait dans la poussière.

Le temple semble être une bonne piste. On reviendra avant le coucher du soleil.

« D'accord. Faites attention. »

Il ouvrit son bec pour laisser descendre son équipage. Ils n'avaient pas besoin de rester avec lui, car le soleil se coucherait bientôt et le rendrait incapable de voler.

Incapable d'aider ses amis s'ils en avaient besoin.

Il sentit une lumière au dessus de lui. La pâle demi-lune brillait à travers les nuages aux couleurs du crépuscule, et devenait de plus en plus vive au fil des secondes. Elle ne suffirait pas à le faire voler, mais il aimait se l'imaginer. Voler la nuit sous les étoiles, ne serait-ce pas grandiose? De voir les lumières des villes en dessous de lui, la lune se reflétant sur l'océan? Être agile et discret, planer comme une chauve-souris dans la pénombre de la nuit? Ce serait fantastique!

Il se devait d'essayer. Le soleil descendait, et son énergie avec lui, se réduisant au point de l'épuiser et l'endormir; mais il essaya de rester éveillé. Pense à quelque chose! Ne t'endors pas! Il chantonna dans sa tête, une gigue espagnole qu'il connaissait, pour essayer de concentrer son énergie quelque part autre que son sommeil. Le ciel se rougissait et il pouvait à peine voir quoi que ce soit, et s'il avait encore une bouche, il aurait baillé. Mais il résista comme un soldat de garde, s'occupant l'esprit. Et comme il ne pouvait pas bouger ou faire le moindre effort physique, il se mit à se rappeler. À se souvenir de ses aventures.

Les magnifiques temples d’Égypte, avec leurs statues, leurs ornements d'or et de pierreries, leur savante écriture tout en images et allégories, leurs dieux et leurs idoles aux visages animaux.

La jungle indienne, ses forts massifs, les animaux étranges et inconnus qui rodaient dans ses ombres, les habits aux mille couleurs, le sable chaud sous ses pieds.

La beauté du rivage japonais, l'imposante silhouette du Sakurajima à l'horizon, la mer bleue recelant poissons et perles rares, les temples colorés, les forêts luxuriantes.

La richesse des paysages chinois, les rizières s'étirant jusqu'au ciel, les villes débordant de sons et de parfums, le froid des montagnes enneigées, les splendides statues de dragons veillant sur chaque recoin.

Les chaudes terres des Incas, les petites villes dans les montagnes, les temples et les ruines riches d'histoires, les chemins et les rivières qu'ils traversèrent dans leur voyage, la musique poétique des villages, les vertes prairies et forêts.

Le bleu de l'océan, des lieues et des lieues de vagues azurées brillant sous le soleil, les cris des mouettes au dessus de leurs têtes, le doux bercement du navire sous ses pas, le battement des voiles et des cordes dans le vent, les chants de marins tout autour.

La camaraderie de Barcelone, le silence du monastère, les rues pavées de pierres, les criées et les bruits du marché, le tapotement de la pluie sur les toits et les fenêtres, les jeux des enfants dans les rues, le recueillement de la grande bibliothèque avec ses livres et ses rouleaux.

La familiarité de sa chambre. Le calme, le silence. L'obscurité réconfortante. La jolie lune dorée dans sa main. Son trésor, sa possession, son propre petit mystère. Le zigzag de son doigt d'enfant suivant les gravures. Sa quête, son passé et son futur.

La chaleur des murs de marbre blanc. Les pas résonnant dans le hall, les murmures des jeunes filles. Le son des voix chantant en chœur. L'éclat des statues dorées, les couleurs des offrandes et des cadeaux sous la lumière des torches. Les têtes baissées des pèlerins et des fidèles, les nouveaux visages qui entrent. Le visage étranger, intriguant.

Son visage. Son sourire. Sa voix. Sa main. Son rire. Sa lame. Sa mélodie. Ses bras. Ses cheveux. Son étreinte. Son pendentif. Ses lèvres. Son absence. Sa présence. Sa promesse. Ses plans. Sa chaleur. Son bonheur. Sa surprise. Son chagrin. Son secret. Ses larmes.

Wayra. Ses pleurs. Ses mains. Son sourire. Sa vie, son futur, sa chance, son père, son bonheur.

Mon bonheur.

Esteban se réveilla soudainement, comme si on l'avait giflé au visage. Son corps était pris de tremblements inconnus, et il se mit à paniquer. Il ne pouvait pas voir dans le noir, mais il sentait l'air qui battait et claquait tout autour de lui. Il se rendit alors compte de deux choses.

D'une, il était réveillé bien après le coucher du soleil.

De deux, il était pris d'une horrible douleur.

Ça venait de son aile gauche, de ses plumes jusqu'aux joints, une sensation nouvelle et inconnue. Une douleur brûlante, déchirante comme il n'en avait jamais connu, si bien qu'il ne pouvait même pas la comparer. Vicieuse et atroce, elle le mordait comme un animal féroce. Il voulut crier, faire n'importe quoi pour soulager cette sensation, mais tout ce qu'il put faire était trembler encore plus et glatir comme un vautour sauvage.

Il essaya de voir, mais la lumière de la lune se reflétait trop peu. Toutefois, une seconde après, une forte lumière brilla au dessus de lui, et cette fois-ci ce fut sa queue qui fut en proie à une douleur assassine. Il cria à nouveau, essayant de dégager de là, mais son corps n'était pas alimenté et il ne pouvait pas remuer la moindre plume. La douleur se répandait, montait le long de son dos, et il se mit à craindre comme jamais auparavant. Il était une machine! Pourquoi est-ce qu'il avait mal!? Et qu'est-ce qui lui faisait tant mal, nom d'un chien!?!

Quelque chose recouvrit la lune, l'aveuglant presque. Quelque chose de gigantesque et de lent, qui volait. Mais ça ne se pouvait pas! Ça ne pouvait...il ne pouvait pas être ici! Pas maintenant, pas là…

Oh, bontés divines. C'était un piège, pas vrai? Il remarque un signal bizarre dans le désert, et le suit comme ça, sans se douter de rien! Mais qu'est-ce qu'il peut être stupide!!

Il essaya de s'écarte, de décoller, de déployer les ailes. Mais sous le coup de la douleur, il ne sentait plus son aile ni sa queue. Il était paralysé, mentalement comme physiquement, et ne savait plus quoi faire. Il voulut appeler à l'aide, quelqu'un, mais il ne pouvait pas. Il ne pouvait plus rien.

Il sentit son corps se faire soulever, sa tête se relever. Un signal sonna dans sa tête, comme celui du médaillon de Zia qui lui faisait ouvrir le bec; mais il ne pouvait pas répondre. Il n'avait pas l'énergie nécessaire pour bouger son bec, et il savait que ce serait une terrible idée de laisser cet intrus, ce traître toucher à ses commandes. Il garda le bec serré, se défendant comme il pouvait pour ne pas laisser l'ennemi s'emparer de lui. La douleur continuait, se répandait dans son corps, et il voulait crier et se tordre de détresse, alors que son corps se remplissait d'horribles sensations qui lui démangeaient et brûlaient les entrailles d'orichalque. Il voulait sortir d'ici! Il en avait besoin!

La nef bougea, et un rayon de lune illumina son visage, lui apportant une faible dose d'énergie. Et alors que son bec brillait de sa faible lumière blanche, une pensée lui vint soudain. Un ordre.

« Retire l'emblème du soleil! »

Il n'avait ni le temps ni l'énergie de se poser de questions. Il se concentra sur l'arrière de son crâne, sur son tableau de bord, et localisa l'emblème qui l'activait. Il avait juste assez d'énergie pour faire ce qu'il devait faire, et il le ferait! Il essaya, forçant ses pensées et son pouvoir pour s'exécuter, pour se libérer alors que son corps se faisait soulever dans les airs. Il ne savait pas comment faire, ou même si c'était possible, mais il n'avait plus rien à perdre. Il força et se concentra sur cette partie de lui-même, concentra son énergie, jusqu'à ce qu'il sente quelque chose bouger.

D'un coup sec, il envoya l'emblème du soleil hors de sa fente, et glatit de triomphe. Puis tout devint noir.

~~~~~

« Laissez-nous! »

« – Qu'est-ce que vous allez nous faire!? »

« – Taisez-vous, sales gosses! »

Gaspard finit d'attacher la corde, et se recula des deux enfants qui s'agitaient en tous sens. Non loin, un Mendoza inconscient était fermement gardé, et Pedro et Sancho paniqués étaient attachés à un tonneau.

« Vous ne vous en tirerez pas comme ça! », cria Tao, tentant de se libérer.

« – Oh, voyons donc. », ricana Ambrosius en s'approchant. « Nous n'irons nulle part. On peut tous rester ici et avoir une petite conversation. »

« – Comme si on voudrait jamais rester avec vous! »

« – Qu'est-ce que vous nous voulez!? », s'énerva Zia.

Sa seule réponse fut un sourire narquois du petit homme, et un ricanement qui ne laissait paraître rien de bon.

« Vous verrez bien, les enfants. Vous verrez bien. »

La porte de la nef s'ouvrit, et Laguerra entra, rengainant son épée.

« Le Condor est maîtrisé. Mais je ne vois pas le troisième. »

Ambrosius parcourut ses prisonniers du regard, les doigts dans sa barbe.

« Étrange. Vous trois êtes pourtant comme les doigts de la main...se pourrait-il que notre jeune ami nous ait quittés? »

« – Ne parlez pas comme ça d'Esteban! Je...je vous botterai les fesses! »

Ça ne le fit que sourire davantage.

« Eh bien, eh bien...je ne m'attendais pas à mieux de la part du petit bâtard d'Athanaos, après tout. Il n'est certes qu'un sang-mêlé, mais il montre plus de prouesse pour la science atlante que je n'avais espéré. Cela me facilite grandement la tâche. »

Il tapa des mains, comme pour se préparer.

« Allons bon! Il est temps de nous mettre au travail. »

« – Qu'est-ce que vous allez lui faire?! Répondez!! »

« – Oh, n'ayez crainte, je ne ferai aucun mal à votre ami! », répondit-il d'un air mauvais. « Le rayon noir n'a fait que le paralyser un peu. Votre chère machine volante ne va pas souffrir...ce qui veut dire que je peux la décortiquer sans problème. »

« – Espèce de monstre!! »

Il ne fit que feindre la flatterie, avant d'ouvrir la porte.

« Gaspard, je compte sur vous pour garder un œil sur nos invités. J'ai un oiseau à plumer. »

« – Revenez ici!! Ambrosius!! »

Mais il referma la porte derrière lui.





En fait c'est plutot marrant d'imaginer les dialogues les plus salopards possibles avec la voix d'Ambrosius.
Modifié en dernier par Sandentwins le 17 août 2019, 15:50, modifié 1 fois.
:condor: Le meilleur personnage de toute la série, c'est la mère d'Esteban.:condor:

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Re: (Fanfiction) Sa Machine Ailée

Message par TEEGER59 »

Sandentwins a écrit : 24 juil. 2019, 01:36 Tu me montreras ca? J'ai hate de vous lire, j'ai déjà vu pas mal de perles par ici.
Va dans le topic MCO saison 4 (fanfic) page 11.
Épisode 4, révélations.
:Laguerra: : AH! Comme on se retrouve!
:Mendoza: : Ma première leçon ne t'a pas SUFFIT?
:Laguerra: : Cette fois, tu ne t'en sortiras pas si FACILEMENT!
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Re: (Fanfiction) Sa Machine Ailée

Message par Sandentwins »

TEEGER59 a écrit : 24 juil. 2019, 03:14
Va dans le topic MCO saison 4 (fanfic) page 11.
Épisode 4, révélations.
Pour ce que j'en ai lu, c'est pas mal!

:condor: Chapitre 10: Lumière :condor:

Esteban ne sait pas où il est.

Autour de lui, il n'y a que ténèbres. Cette sensation de flotter nulle part. Il essaie de situer ses ailes, son bec, mais échoue misérablement. Et il déteste ça.

Il n'y a pas de lumière. Il ne voit rien. Il ne peut pas bouger, sentir, faire quoi que ce soit face à sa situation. C'est tout juste s'il pouvait encore penser clairement.

« Ça craint. »

Il se sentait plutôt amer, mais qui pouvait l'en blâmer? Son corps était assailli, probablement déchiré par les mains et plans diaboliques d'Ambrosius, et tout ce qu'il a pu faire était d'abandonner le navire. Il aurait fait un piètre marin, décidément.

Au moins il n'avait plus mal, et c'était déjà ça. Il ne savait pas pourquoi donc une machine aurait mal, mais il se disait que c'était pour la même raison qu'il sentait le vent sous ses ailes ou la terre sous ses pattes. Maintenant qu'il n'avait plus mal, il pouvait réfléchir à ce qui se passait.

Il ne pouvait pas bouger. Il se sentait à peine, il savait juste qu'il était…là. C'était où, « là »? Qui sait. Lui n'en sait rien. Ça pourrait être pire, donc il ne s'en plaindrait pas. Mais il se demandait quand même ce qui se passerait ensuite. Ce qu'il allait faire.

« Pourquoi? »

Pourquoi? Eh bien, parce que...parce que ça craint, c'est tout! Il était empêtré jusqu'aux ailes, et ne pouvait rien y faire! Dans un pareil moment, il se sentait bien stupide et inutile.

« Parce que. »

Qu'est-ce qu'il pourrait dire d'autre? Il n'en savait rien, pour sur. Il n'avait même pas envie de se chercher des excuses.

« Pourrais-tu donner une réponse plus précise? »

Oh, bien sûr qu'il pouvait. C'est pas comme s'il avait grand-chose d'autre à faire, à part flotter dans le vide.

« Parce que...j'aimerais savoir ce qui se passe. Mais je peux pas. Je peux juste m'inquiéter. »

À propos de ses amis. De son corps. Et de plein d'autres choses qui lui sortaient de l'esprit là maintenant, mais dont il s'inquiétait quand même.

« Ton inquiétude prouve ta bonne volonté. Ce n'est rien d'inutile. »

S'il avait encore des épaules, il les aurait haussées.

« J'aimerais en faire plus. Mes amis sont sûrement en danger, et moi je suis là, à me plaindre. »

« – Que ferais-tu, si tu pouvais faire tout ce que tu voulais? »

Il y réfléchit. Il n'avait pas beaucoup d'options, même si son corps était en parfait état.

« Je...je m'envolerais vers eux. Et je détruirais le vaisseau du traître. »

Il aurait juré entendre un petit rire à l'arrière de son esprit.

« C'est là un plan audacieux. Mais ton corps y résisterait-il? Et s'il était actuellement retenu loin de la lumière du soleil? Si tes amis se trouvaient à bord de ce bateau? »

C'était hélas possible. Ambrosius n'était pas bête, il aurait certainement amené le Condor là où la lumière ne passerait pas. Ce qui expliquait sans doute cette pénombre.

« ...je ne sais pas. J'ai aucune idée de ce que je ferais. »

« – Ce sont là de sages paroles. Celui qui n'a pas la réponse et admet ses torts a plus de chances de réussir que celui qui porte une confiance aveugle en ses plans. »

C'était pas faux. Mais ça ne l'aida pas plus.

« Qu'est-ce que je dois faire, alors? Comment me sortir de ce pétrin? »

Ce pétrin qu'il a causé lui-même. Tout ce qui s'est passé était de sa faute, et il s'en sentait horriblement coupable.

« Regarde autour de toi. »

Il essaya. Il essaya de se concentrer, de voir toute la lumière qu'il pouvait voir. De se concentrer sur la moindre petite lueur qui l'atteindrait. Et il échoua.

« Il n'y a rien. Juste du noir. »

« – Tu essayes de voir avec ton regard de condor. Avec un corps massif aux milliers d'angles. Pour le moment, tu as besoin d'une perspective plus humble. »

Une...perspective plus humble? Ça voulait dire quoi? Il y réfléchit pendant un moment, confus, puis la réponse vint.

« L'emblème du soleil! Je...je l'ai éjecté, et me suis éteint une seconde après. Le Condor ne peut pas voler si l'emblème n'y est pas...mais du coup, ça veut dire que..? »

« – Cela veut dire que ton esprit est actuellement préservé dans ce petit disque solaire. »

C'était logique, maintenant! Ça expliquait pourquoi il ne pouvait pas bouger, et ne voyait que très peu des alentours.

« C'est logique. Mais comment me sortir de là? Et comment... »

Il se tut. La lumière avait changé, dans ce qu'il reconnaissait comme étant le cockpit du Condor. Quelque chose venait de bouger.

« Quelque chose approche! », mit-il en garde, sans savoir si ça servait à quoi que ce soit.

Quelque chose bougeait autour. Quelque chose de grand et de dandinant, de vivant. Un monstre? Non, attends. Il devait changer de point de vue. Il devait- ouille! La chose s'était cognée contre lui.

« Mais fais attention! », dit-il par réflexe.

La chose s'arrêta, remua. Et le toucha à nouveau.

Esteban?

S'il avait encore ses paupières, il aurait cligné de surprise. Il reconnaissait cette voix!

« Pichu! Pichu, c'est toi? »

Esteban!!

« Pichu, par ici. Tu peux ramasser l'emblème du soleil? Ramène-moi dans la lumière, s'il te plaît. »

Le perroquet hésita, avant de ramasser le disque dans son bec et de l'emmener à la lumière. Il était tombé sous un siège lorsque Esteban l'avait éjecté, ce qui expliquait pourquoi il ne pouvait plus rien voir. Pichu parvint à le soulever et à le laisser tomber sur le siège du pilote, où la lumière passait déjà mieux. Esteban recouvra la vue, ce qui était un soulagement.

Il faisait encore sombre. La lune brillait faiblement. La tête du Condor était ouverte, et le vent soufflait doucement; il était dehors. Sous cette perspective, Pichu avait l'air d'une boule de plumes géante.

« Pichu, où sont les autres? Tu le sais? »

Ambrosius, Ambrosius! Tao parti! Zia parti! Alerte, alerte!

Quel immonde personnage! Qu'est-ce qu'il leur avait fait? Il tenta de penser à un plan, à un moyen de les sauver avant qu'il ne soit trop tard.

« Et où est-il maintenant? Qu'est-ce qu'il compte faire? Tu peux me dire? »

Esteban, à l'aide! À l'aide!!

Et il se mit à voleter de détresse. Esteban n'en saurait pas plus de sa part, mais c'était mieux que rien.

« Je comprends rien... », soupira-t-il. « Qu'est-ce qu'il peut bien vouloir? Il a déjà le double médaillon, et sait où se trouve la cinquième Cité. »

Qu'est-ce qu'il leur voulait? Avait-il trouvé une énigme qu'il ne pouvait pas résoudre? Voulait-il forcer Tao et Zia à lui montrer le chemin de la Cité? Ça n'avait pas de sens…

Il repensa au signal qu'il avait suivi. L'appât qu'il avait gobé sans y penser. Pourquoi poser un tel piège dans des ruines vides d'intérêt? Il n'y avait pas de sixième Cité d'Or par ici, pas si près de la cinquième. Ça n'avait rien de logique.

Quand Esteban et ses amis se sont posés ici, Ambrosius l'a attaqué de front. La nuit était alors tombée, il n'avait plus d'énergie. Ambrosius voulait-il s'approprier le Condor? Mais il avait déjà sa nef…

Une nef qu'il a essayé d'attaquer. De lui-même. Un Condor sans pilote, ce qu'Ambrosius aurait très vite remarqué.

Est-ce...est-ce qu'il savait que l'âme d'Esteban avait fusionné avec celle du Condor? Mais même s'il le savait, qu'est-ce qu'il lui voulait?

« Je comprends pas! J'y comprends plus rien! »

Il en avait marre, il était épuisé. Il n'avait pas assez de forces pour réfléchir, avec si peu de lumière. Il ne savait pas ce qui se passait, et il détestait ça. Il voulait juste revoir ses amis, et s'envoler loin d'ici pour ne jamais revenir. Il en avait eu assez, par sa seule faute.

Il voulait pleurer, mais n'avait plus d'yeux pour le faire. Et c'est peut-être ce qu'il haïssait le plus dans cette histoire.

« Qu'est-ce que tu ne comprends pas? »

« – Je ne sais pas ce que je fais ici. Pourquoi Ambrosius en a après moi. Qu'est-ce qu'il me veut! »

Il se recroquevilla, comme un enfant boudeur dans une mauvaise humeur. Il ne comprenait plus rien, il se sentait en faute. Et personne n'était là pour l'aider.

Personne à part cette voix.

« ...qui es-tu, d'ailleurs? », demanda-t-il au bout d'un temps, exaspéré. « Je crois bien que je te connais. Mais qui? »

Le silence régna durant un long moment. Esteban craignit l'avoir offusquée, ou dit quelque chose de mal. Mais la voix revint finalement.

« Je t'ai accompagné depuis le moment où tu m'as vue. Depuis que tu as retrouvé mon corps dans le temple de la montagne Pachamama. »

La montagne Pachamama? C'était le volcan près du grand lac, où ils ont cru trouver la première Cité d'Or. Mais au lieu de maisons et de rues en or massif, il n'ont trouvé que de la pierre, de la lave, et…

« ...le Grand Condor. »

Son sang n'aurait fait qu'un tour, s'il lui en restait encore.

« C'est bien toi? Le Grand Condor? Tu es...son âme? »

La voix prit un moment pour répondre.

« C'est bien cela, je crois. »

Et ainsi la voix d'Esteban s'emplit de joie.

« Mais c'est...c'est fantastique! Je ne savais même pas que le Grand Condor avait vraiment une âme! Ça expliquerait ce que je fais ici...mais quand même, c'est...c'est si fou! »

Quelques mots de cette voix ont suffi à lui faire oublier ses inquiétudes et sa mauvaise humeur. À la place, l'excitation envahit son âme d'enfant.

« Tu dois avoir des centaines...des milliers d'années! As-tu connu le peuple de Mu? Est-ce que tous les véhicules d'orichalque ont une âme? Comment tu t'es retrouvée sur cette montagne? Où- »

« – Voyons, Esteban, pas tant à la fois! », s'amusa la voix. « S'il te plaît, tu me poses beaucoup trop de questions. J'adorerais te répondre, mais tu comprendras que le temps presse. S'il te plaît, mon petit, ralentis donc. »

« – Désolé. C'est juste que...ouah, et dire que je t'ai piloté durant tout ce temps, et que je n'ai jamais réalisé…! »

« – Tu ne pouvais pas savoir. Et pour être honnête avec toi...je ne voulais pas que tu saches. »

« – Hein? Pourquoi pas? »

Une fois encore, le silence dura.

« Je n'en suis pas sûre moi-même. Peut-être que le moment n'était pas venu. Peut-être avais-je peur de te détourner de ta quête. Je n'ai donc rien dit, et j'ai attendu...et en attendant, je t'ai observé. »

Il jurerait sentir la voix devenir plus...affectueuse.

« Je vous ai observés, toi et tes amis, alors que vous partiez à l'aventure. J'ai appris quelle genre de personne tu étais, comment tu pensais et agissais. Je t'ai vu mûrir et grandir. Et je ne t'ai certes connu qu'une année de ta vie, mais je ne la regrette en rien. »

Esteban se sentit un peu gêné par cette déclaration. Depuis le début de son temps de pilote, il y avait eu une âme en lui, qui l'observait. Qui en était heureuse.

« Eh bien...merci. Je...je ne sais pas quoi dire, mais...si tu es content, moi aussi, Condor. »

Il s'arrêta.

« Attends. Le Grand Condor, c'est un nom qu'on t'a donné. Mais toutes les machines de Mu ont un vrai nom...tu voudrais bien me donner le tien? »

La voix sembla hésiter. Une fois encore, il eut peur d'avoir mal fait, d'offenser cette présence qui était si gentille avec lui. Mais il l'entendit parler à nouveau, cette fois-ci d'une voix plus douce.

« Je m'appelle Killa. C'est tout ce que je sais. »

Il savait qu'il y avait là un sens caché, mais il passa outre pour le moment.

« C'est un plaisir de te rencontrer, Killa. Enfin...on s'est rencontré autrefois, mais maintenant je connais ton nom. »

C'est un très joli nom, se dit-il.

« C'est un plaisir de connaître le tien, Esteban. »

Au dehors, la lune avait reparu de derrière les nuages, et les environs étaient plus visibles, lui rappelant où il était. Ce qu'il avait à faire.

« Killa, est-ce que tu sais ce qu'Ambrosius veut de nous? J'ai l'impression qu'il ne nous a pas capturés sans raison. »

« – Je crains bien que oui. »

La lumière de la lune baignait le cockpit d'une douce lueur pâle, couvrant tout d'un halo d'argent. Il y garda son attention, alors qu'il écoutait le récit du Condor.

« J'ai autrefois entendu dire que si le peuple de Mu avait une connaissance avancée de la mécanique et des machines, le peuple de l'Atlantide connaissait le corps et l'âme de l'homme plus que personne. »

Peu à peu, une vision lui vint en tête. Une pensée qui n'était pas la sienne, que Killa partageait avec lui. Une vision de silhouettes entourées d'une lumière dorée.

« Ils connaissaient les faiblesses du corps humain, la manière dont il se dégradait avec l'âge. Ils cherchèrent donc un moyen d'effacer les effets du temps. »

« – Le secret de la vie éternelle. »

Son père lui en avait touché mot, alors qu'il parlait de son temps au sein de l'Ordre du Sablier. La quête de l'alchimie pour atteindre l'immortalité. Le but de l'Ordre, après le moyen de créer de l'orichalque.

« Ils finirent par le trouver. Leur savoir a depuis été perdu, mais l'ordre des alchimistes essaie de le retrouver. »

« – Mais qu'est-ce que ça a à voir avec nous? »

« – Penses-y pendant un moment. Quel est l'autre but des alchimistes, ce qu'ils étudient et cherchent en vain? Cette chose dont ils essayent de percer les mystères? »

Il y réfléchit. Sa première réponse fut les Cités d'Or et leur savoir, naturellement. Un savoir scientifique, mécanique, magique et défensif. Ça ne l'aurait pas surpris si elles renfermaient également le secret de l'immortalité.

« On raconte des choses, au sein de l'Ordre. », continua la voix. « Comme on me l'a un jour dit, leurs deux buts sont étroitement liés, plus encore qu'ils ne le savent. Peut-être même ne font-ils qu'un. »

Leurs deux buts...l'immortalité et l'orichalque? D'accord, mais qu'est-ce que ça avait à voir avec lui? Il n'était pas immortel. Quand bien même il était un descendant de l'Atlantide, il n'était qu'un enfant, dont l'âme reposait dans un condor géant. Il n'était pas immortel, il avait juste…

Il…

...attends voir une minute. Il est bel et bien mort, pas vrai? Il est mort! Il a cessé de vivre, ses amis ont assisté à ses funérailles, et son corps de chair reposait désormais à Patala, où son père se trouvait! Alors comment pourrait-il toujours être là? Comment son âme pouvait-elle rester intacte, prisonnière du corps d'orichalque de ce volatile?

Et puis, peu à peu, il comprit. Il comprit ce qui se passait. Il vit où Killa essayait de le mener, ce qui se passait avec lui. Ce qu'Ambrosius voulait.

« ...le secret de l'immortalité. », souffla-t-il. « La faiblesse du corps humain...la réponse, le secret, c'est de le remplacer par un corps qui ne peut pas mourir, un corps en orichalque! C'est ça, le secret, c'est ça qu'il veut!! »

C'est comme ça qu'Esteban a survécu. Il est mort, mais son âme était toujours là.

« Et maintenant qu'il nous a faits prisonniers, il va le trouver! Il va comprendre comment ça fonctionne, et il deviendra invincible et immortel! »

Ce n'est qu'en cet instant qu'il comprit la profondeur du pétrin où il s'était fourré, et les conséquences désastreuses qu'aurait la victoire d'Ambrosius.

« Il faut l'arrêter! On ne peut pas le laisser faire! »

« – J'admire ta détermination. Mais notre aile et notre queue sont toujours endommagées. Quand bien même le soleil brillerait, nous ne pourrions pas décoller. »

« – Mais on ne peut pas rester ici à rien faire! »

« – Esteban, calme-toi donc. Réfléchis à un plan avant d'agir. »

Un plan. Mais quel genre de plan? Comment s'en sortir lui et ses amis? Il ne pourrait pas, voilà le problème! Il était coincé ici, et n'y pouvait rien.

« Même si j'avais un plan, ça changerait quoi? Je ne peux pas bouger d'ici. »

« – Pourquoi dis-tu cela? »

Il aurait aimé encore avoir ses bras, pour montrer à grands gestes tout ce qui l'entourait.

« Tu l'as dit toi-même, ma conscience est prisonnière de l'emblème du soleil, qui n'avait définitivement pas de pattes la dernière fois que j'ai vérifié! Et même si je parvenais à le remettre dans le Condor, on est toujours blessés, au milieu de la nuit. »

C'est un miracle qu'il puisse rester éveillé.

« Puis-je te confier un secret? »

Pour être honnête, ces mots attirèrent toute son attention.

« Quel secret? »

« – Imagine-toi coincé sur place, incapable de bouger. Toutefois, tu peux projeter tes sens, voir et entendre ce qui se passe ailleurs. Tu peux créer une image de toi-même, qui se déplace à loisir alors que ton âme reste au même endroit. »

« – Tu veux dire que...je peux vraiment sortir d'ici? »

« – Tu peux en effet temporairement dépasser les limites du Condor. »

S'il pouvait, il aurait sautillé d'excitation.

« Comment ça marche? Tu sais le faire? Montre moi, je t'en supplie! »

« – Esteban, reste calme. Je peux t'enseigner, mais j'ai besoin de ton calme et de ton attention. Nous n'avons que jusqu'à l'aube. »

En toute honnêteté, il n'a jamais eu beaucoup d'attention à prêter. Les leçons du monastère étaient si ennuyeuses qu'il se demandait comment il avait bien pu apprendre à lire.

« ...je suis obligé? », plaida-t-il.

« – N'aie pas peur, ce ne sera pas une leçon au sens où tu l'entends. Je peux te montrer le procédé directement, de mon esprit au tien. »

Une autre image apparut dans son esprit, celle d'un lever de soleil sur un magnifique paysage. Pris de curiosité, il essaya d'en envoyer une en retour, un souvenir de lever de soleil sur l'océan. Quelle pratique méthode de communication...sans doute expliquait-elle ses rêves.

« Crois-moi, tu n'auras pas le temps de t'ennuyer ou de te distraire. C'est presque instinctif. Ainsi ai-je appris moi-même. »

« – Bon, ben...si tu le dis. »

Il essaya de se calmer et de taire ses nerfs. D'écouter ce que Killa avait à lui dire, à lui montrer. D'ouvrir son cœur.

La voix reparut, douce et chaleureuse. Familière.

« Tout comme ton père m'a appris le secret atlante de la transmutation, je vais t'apprendre le secret muien des luminoprojections. »

~~~~~

« Comment ça, il ne marche pas? »

« – C'est ce que j'essaye de vous dire! Il refuse de s'ouvrir! »

« – Ce n'est qu'une machine, il ne peut rien refuser! »

Ambrosius leva le double médaillon à nouveau, mais le Condor s'obstina à garder le bec fermé, l'énervant encore plus.

« Soit! Je n'ai pas besoin d'accéder aux commandes. Je m'en sortirai très bien tout seul. »

Il réajusta les paramètres du rayon noir, et visa le ventre du Condor, tirant un fin rayon qui découpa une ouverture dans le corps du monstre. Un pan de sa coque tomba, dévoilant les rouages et mécaniques internes.

« Tant que je peux en extraire le cœur, le reste n'est que décoration inutile. »

L'intérieur était un cafouillis d'engrenages et de pistons, inactifs pour le moment. Bizarre, mais il n'allait pas s'en plaindre. Il se fraya un chemin à coups de lumière tranchante, faisant tomber plus de pièces en poussière de métal, progressant dans les boyaux du volatile.

Il n'y avait que des mécanismes là-dedans. Rien de différent comparé aux autres machines qu'il avait pu examiner dans sa vie. Avec un peu de mal, il se glissa à l'extérieur, reprenant pied au sol.

« Laguerra, très chère. Nous devons forcer cette bête à nous révéler ses secrets. Monte là-haut et vois si tu peux l'ouvrir. »

Elle regarda la tête du Condor, figée dans sa noble pose.

« Quoi? Là-haut? »

« – Oui, là-haut! Nous avons assez perdu de temps comme ça, il nout faut nous hâter. Ouvre cette chose, allez! »

Elle voulut protester, mais se tut, tournant autour de l'immense animal. Se préparant, elle s'accrocha à la queue, et grimpa comme elle pouvait, faisant attention à ne pas toucher les parties brisées. Son employeur ne lui rendait pas la tâche facile, vu qu'une bonne partie de la zone était désormais un désordre brunâtre qui ne volerait sans doute plus jamais.

Alors qu'elle se frayait un chemin vers le sommet, Ambrosius ramassa quelque morceaux tombés. La pourriture se répandait lentement comme de la moisissure sur du pain, ce qui le fit ricaner.

« C'est bien dommage... », dit-il à voix haute. « Tu as choisi là une bien belle bête pour t'y coller, mon garçon. Je ne m'attendais pas à mieux de ta part. »

Il découpa un autre morceau de l'oiseau, pour révéler les complexes rouages sous sa peau dorée.

« Tu t'es attaché à cette machine, comment pouvait-il en être autrement? Et je te comprends, tu sais, je te comprends vraiment. S'il eut été un rien plus spacieux, j'en aurais fait mon moyen de locomotion favori. »

Toujours pas de trace du cœur. Il commençait sérieusement à s'impatienter.

« Mais ce n'est pas ton œuvre. Un sang-mêlé comme toi ne parviendrait jamais à maîtriser un art que les plus éminents alchimistes ont encore du mal à concevoir! »

Sans prévenir, il frappa le Condor de son arme, enragé. Le métal pourri s'effrita encore plus, et Laguerra faillit tomber.

« Je sais que tu m'entends, Esteban! Ne joue pas l'innocent. Dis-moi comment tu t'y es pris, ou bien ni toi ni tes amis ne reverrez jamais la lumière du jour! Dis-moi qui t'a aidé! »

Sur le cou du Condor, Laguerra parvint finalement à se hisser jusqu'au cockpit ouvert. Elle s'y laissa glisser, soulagée de fouler à nouveau un sol solide.

« Il se croit malin, avec ses ordres... », marmonna-t-elle. « J'ai une tête à savoir comment cet engin fonctionne? »

Les lumières du tableau de bord étaient éteintes, et il n'y avait aucun moyen de pilotage. Elle appuya sur des boutons au hasard, toucha çà et là, cherchant à l'activer. Mais comment faisaient donc ces gamins? Il se passait un truc bizarre ici.

Au loin, le soleil se montrait déjà. Elle craignit une activation soudaine de la machine; mais heureusement, rien de ce genre ne se produisit. Pas d'allumage, aucun bruit bizarre.

« Bon, au moins tu n'iras nulle part, poulette. »

Elle s'assit sur le siège du pilote, et pendant un moment s'imagina chevaucher cette bête géante à travers les cieux; mais elle se débarrassa vite de cette vision stupide. C'est alors qu'elle sentit quelque chose sous sa cuisse; en se levant, elle vit un petit disque de métal gravé dans les pans du siège.

« ...évidemment. »

Elle le ramassa, l'examina. Ce truc entrait sûrement dans la fente ronde du tableau de bord. Ça ne voulait dire qu'une chose, alors.

Alors qu'elle s'apprêtait à l'y mettre, elle entendit alors une voix.

Je ne ferais pas ça si j'étais vous.

Elle s’arrêta net. Cette voix…! C'était celle du gamin!

« Toi! Tu es vivant! »

En êtes-vous sûre? Vous l'avez vu, pourtant. Vous étiez aux premières loges.

Un frisson lui parcourut l'échine. Ce ne se pouvait pas...c'était impossible!

Vous m'avez vu chuter vers ma mort.

« Tu mens! C'est une illusion, c'est ça!? »

Elle essayait de garder la tête froide malgré sa nervosité et sa peur montante. D'en bas, la voix d'Ambrosius lui parvint.

« Qu'est-ce que tu fais donc? Ouvre-moi, le soleil va se lever! »

Sa lumière se répandait lentement sur le corps du Condor, l'entourant d'un halo doré dont les reflets lui donnèrent le vertige. Elle recula, se tenant au siège pour rester debout, ses jambes tremblantes.

Vous m'avez vu mourir, Isabella. Et vous savez ce qui a provoqué ma mort, n'est-ce pas? Vous et vos alliés êtes responsables!

« Tu mens! Tu mens!! »

Je ne dis que la vérité! Et vous serez tous punis pour vos crimes!!

C'en était trop. Elle jeta l'emblème du soleil, prise de panique. Elle ne pouvait pas le supporter, l'imaginer! Et maintenant, à cause des actes d'Ambrosius, elle serait hantée par l'esprit vengeur de l'enfant qu'ils avaient tué!

« Laguerra! Réponds! »

Il devait tout faire par lui-même, pas vrai? Soit! Ambrosius s'accrocha à la queue du Condor, et se mit à escalader à son tour. Le soleil se répandait, courait sur chaque plume de la machine géante, mais il savait qu'elle ne décollerait pas. Il était trop près du but pour échouer! S'accrochant comme il pouvait, il atteignit le dos de la bête, se penchant pour ne pas être déséquilibré. D'ici, il voyait son assistante recroquevillée dans le cockpit.

« Eh bien, qu'est-ce qui se passe? Je ne peux décidément pas te faire confiance... »

À sa grande surprise, elle se tourna vers lui, les yeux écarquillés.

« Il faut partir, Ambrosius! Vite! »

Il ne fit qu'en rire.

« Partir? Et pourquoi donc? Nous sommes trop proches pour quitter, désormais! »

Il se laissa tomber dans le cockpit, examinant les alentours.

« Regarde donc ça! L'emblème du soleil a disparu! Tout véhicule a besoin d'une clé, et celui-ci n'a plus la sienne! »

« – Je suis sérieuse. Il faut qu'on parte! On a assez causé de problèmes comme ça! »

« – Des problèmes? Nous aurions pu tout avoir, si ces maudits garnements n'avaient pas fait des leurs! Et maintenant qu'ils nous ont offert le but ultime sur un plateau, tu voudrais partir!? »

Il ricana. Un rire menaçant, sadique qui déformait son visage de gnome. Elle ne pouvait pas supporter ce spectacle, mais se força à lui empoigner les épaules.

« Notre but n'a plus d'importance! Vous ne voyez pas ce qui s'est passé? Nous avons tué cet enfant, et maintenant il revient nous hanter! »

Il s'esclaffa, et la repoussa.

« Superstitions! Je n'ai pas le temps pour ces sornettes. Ce gamin a été assez bête pour causer sa propre perte, il ne peut s'en prendre qu'à lui-même! »

Il fouilla aux alentours pour retrouver l'emblème du soleil, ignorant l'allure apeurée de Laguerra.

« Je te croyais plus raisonnable. »

« – Je suis raisonnable. Assez pour ne pas rester ici et énerver les fantômes. »

« – Les fantômes! Des inventions idiotes de gens trop lâches pour s'entre-tuer. Ça ne m'a jamais posé problème, pourquoi devrais-je en avoir peur? »

Il se releva, tortillant sa barbe dans ses doigts.

« Je ne vois l'emblème nulle part. Les autres ont dû l'emporter avec eux. »

Laguerra cligna des yeux, ses mains déformant presque le tissu du siège.

« C'est...c'est impossible. Il était juste là, je l'ai vu! »

« – Juste là? Et pourquoi ne me l'as-tu pas apporté, au lieu de te cacher comme une peureuse? »

Elle ne put répondre. Alors qu'ils se disputaient, le soleil s'était levé, et enveloppait le Condor de sa lumière. Elle se diffusait dans l'air comme un voile, brouillant tout et les obligeant à ferme les yeux. Et c'est alors qu'ils entendirent la voix du dessus.

Maintenant, Pichu!!

Quelque chose s'agita dans les airs, et il y eut un clic. Ambrosius ouvrit les yeux malgré la lumière, et vit le perroquet vert pousser l'emblème dans sa fente.

Le Condor trembla, et la lumière se refléta tout autour, l'enveloppant d'une armure étincelante qui le fit crier de douleur en se couvrant les yeux. Il tomba à genoux, des étoiles lui brillant au coin des yeux, s'accrochant à ce qu'il pouvait. La tête du Condor se releva et son bec s'ouvrit, les renversant presque, et ses ailes se déployèrent sous le soleil.

« Tu ne t'en sortiras pas si facilement! », hurla Ambrosius, essayant de voir à travers la lumière aveuglante.

Mais c'est alors que la lumière bougea, comme si elle prenait vie. À travers ses doigts, il la vit pendre forme, s'assembler sur le cou du Condor. Il n'arrivait pas à distinguer ce qui se passait, même quand l'éclat se calma; mais il entendait clairement. Il entendit une voix, la voix d'un enfant qu'il ne connaissait que trop.

Je vais sauver mes amis. Toi, tu t'occupes de ces deux-là.

Et juste après, une autre voix. Plus mûre, plus imposante.

Celui là n'ira nulle part. Pas après ce qu'il m'a fait.

L'enfant de lumière sourit, et sauta hors du Condor.






Le prochain chapitre sera le dernier. trop de suspeeeeense!!!!
Modifié en dernier par Sandentwins le 31 juil. 2019, 22:55, modifié 2 fois.
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Re: (Fanfiction) Sa Machine Ailée

Message par Akaroizis »

Le dernier ? :cry:
Autant j'étais perplexe au début, autant j'aime beaucoup. C:
Le présent, le plus important des temps. Profitons-en !

Saison 1 : 18.5/20
Saison 2 : 09/20
Saison 3 : 13.5/20


Ma présentation : viewtopic.php?f=7&t=80&p=75462#p75462
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Re: (Fanfiction) Sa Machine Ailée

Message par Sandentwins »

Toues les bonnes choses ont une fin. Et en parlant de fin, la voici donc.


:condor: Chapitre 11: Ailes :condor:

Esteban toucha au sol.

D'un seul coup, tout autour de lui fut noyé dans la lumière crue. Elle rebondissait sur chaque surface visible, s'affolait sans direction, et lui revenait comme un écho de sa propre lumière. C'est ainsi qu'il pouvait voir où il avait atterri, ce qui se trouvait autour de lui et comment tout bougeait et réagissait. Tout comme dans le Condor.

Mais contrairement au Condor, ce genre de vue par la lumière était bien plus intense. La lumière était partout, venant de lui au lieu de juste lui parvenir. Elle l'envahissait, l'étourdissait et l'aveuglait, plus rapide qu'avant. Tout semblait bouger au ralenti, et il n'y comprenait rien.

Il se retourna, et vit la silhouette gigantesque du Condor, découpée dans le chaos de lumière de son champ de vision. Il bougeait, se tordait, se secouait alors que la lumière l'alimentait, repoussait les intrus qui essayaient de s'y accrocher désespérément.

Il savait que Killa s'en sortirait, et les repousserait même avec ses blessures. Il n'avait pas à s'inquiéter. Pour le moment, il devait retrouver ses amis.

Il sauta en avant, mais tout s'accéléra et il se retrouva à plusieurs dizaines de pieds de son point de départ. Désorienté, il essaya de s’arrêter avant de tomber plus loin, et de retourner là où il était. Mais il ne fit que se perdre encore plus, et de presque s'écraser sur les ruines.

« Esteban! »

C'était la voix de Killa.

« Que fais-tu donc? Dépêche-toi! »

« – J'essaie! »

Il essaya de se relever, mais trébucha à nouveau. Son corps était plus léger qu'une plume, et ses propres mouvements étaient trop rapides, le déséquilibrant dès qu'il essayait de bouger ne serait-ce qu'un doigt.

« Je peux pas me contrôler! Ça va trop vite! »

« – Tu dois essayer! »

Le Condor essayait de décoller pour désarçonner Ambrosius et Laguerra, mais c'était difficile à faire avec une queue abîmée. Et avec son aile blessée, il était aussi déséquilibré que lui. Pourtant la voix continuait de lui parler, à travers une connexion lumineuse qui les reliait.

« Ne pense pas en termes vivants. », continua-t-elle. « Concentre-toi là où tu veux aller, et va! »

« – Plus facile à dire qu'à faire! »

Ses amis étaient probablement retenus dans la nef. Il devait s'appliquer et y foncer, s'il voulait les sauver! Ne pense pas en termes vivants. Fais ce qu'on te dit.

Il rassembla ses forces, et sauta en l'air, laissant la lumière le guider. Comme prévu, il ne pesait absolument rien, et s'envola bien plus haut que ce qu'il voulait. Mais au moins il pouvait corriger sa trajectoire, et atterrir là où il voulait. Il tendit les mains et attrapa une sangle du ballon, glissant le long de la corde comme il pouvait jusqu'à toucher le pont. Tu parles d'un étrange moyen de déplacement!

Même s'il était désorienté, il comprenait à peu près. Ce qu'il prenait pour son corps était un amas de pure lumière, un secret que Killa lui avait appris et qui lui rappelait les luminoprojections des Grands Sages qu'ils ont rencontrées dans la seconde Cité d'Or. L'ancien secret de la lumière mouvante, perfectionné par le peuple de Mu, qui lui permettait de se forger un corps de lumière pour porter ses sens. C'était sans doute la plus étrange expérience qu'il ait jamais vécue de sa vie, mais sur le coup il n'allait pas perdre son temps à toutes les classer.

Qu'est-ce qui se passe ici!?

Il se retourna, toujours à grande vitesse, et vit quelqu'un s'approcher dans toute cette clarté. À voir leur épée sortie, il n'était pas d'humeur à jouer. D'instinct, il leva les poings pour se défendre.

Gaspard courut vers lui, mais ses mouvements semblaient lents et prévisibles. Esteban n'eut aucun mal à s'écarter et éviter le coup de sa lame, cette fois sans se perdre au loin. Retournant vite à son point de départ, il le poussa sur le pont, le faisant trébucher et gagnant un peu de temps. Autour de lui, la clarté se voilait d'une obscurité inconnue, qui cachait la lumière. Il l'ignora, et chercha à se frayer un passage sous le pont.

Il voulut ouvrir le passage vers l'intérieur, mais ne savait pas comment faire. Frustré, il tapa des poings sur le bois, ce qui ne produisit aucun son. Toutefois, il vit que plus il touchait le sol, plus ce voile sombre grandissait et floutait sa vision. Il se demanda ce qui se passait, mais tout redevint clai d'un seul coup, et le passage s'ouvrit. Il sauta en bas, et c'est là qu'il entendit.

Ses amis étaient là. Et ils appelaient à l'aide.

« Tao! Zia! »

Il courut vers eux, non sans se perdre en tous sens comme une luciole surexcitée. Ils hurlèrent en le voyant, et il ne pouvait pas leur en tenir compte.

« Vous allez bien? »

Esteban! Tu dois nous sortir de là!

La nef est en feu!


« En feu…? »

Il regarda autour de lui. Dans la faible pénombre de la pièce, les murs se recouvraient lentement de taches brillantes, qui produisaient encore plus d'ombre floue. Soudain, il comprit qu'il s'agissait de flammes, et que de la fumée se formait sous chacun de ses pas.

Il n'était que pure lumière, et son toucher était une arme solaire.

« Vite! Sortons d'ici! »

Il repéra vite leurs liens, et essaya de les défaire; mais il se retint, et se contenta de très lentement poser le doigt sur les cordes, qui se rompirent en morceaux brûlés. Zia et Tao se libérèrent, et se dépêchèrent d'aller aider les autres, toussant toujours à cause de la fumée.

On doit retourner au Condor!

« On ne peut pas, il est toujours blessé! »

Il tonna des poings sur la porte, qui se consuma très vite sous ses coups pour ouvrir un passage suffisamment grand. Tout devenait sombre, et des poutres et planches enflammées leur tombaient dessus. La nef ne tiendrait pas longtemps.

« Sortez tous! Je vous rejoins! »

Il sauta du bord, se retrouvant en l'air à nouveau, et atterrit sur l'aile du Condor. Killa essayait toujours de faire tomber ses agresseurs, mais Ambrosius se tenait fermement au levier serpent.

Je ne laisserai pas une simple machine me défier! Tu dois m'obéir!!

Il faut partir! La nef est en train de brûler!


Esteban bouillit de rage à l'idée de cet homme posant ses sales mains sur son corps d'orichalque. D'un pas, il se retrouva à sa hauteur, et lui agrippa le bras aussi fort qu'il pouvait. Ambrosius cria et tenta de se défaire de sa prise, sa manche brûlant et lui collant à la peau. Il lâcha les commandes, et le Condor baissa rapidement la tête pour le désarçonner. Esteban sauta et se retrouva sur son cou.

« Killa, tu vas bien? Tu pourras nous emmener loin d'ici? »

« – Je peux essayer de forcer, mais cela va détruire ma queue. Je ne peux pas faire ça. »

Ses amis arrivaient, s'échappant de la nef qui brûlait toujours de hautes flammes. Il réfléchit rapidement à un plan pour tous se sortir d'ici.

« On pourrait réparer les dégâts? »

« – N'y pense même pas! »

« – Pourquoi tu dis ça? Ça veut dire qu'on peut le faire, oui ou non? »

« – Non, Esteban. Tu n'as pas assez de forces pour réparer la corruption! »

« – Mais on ne peut pas rester ici, et attendre qu'ils nous attrapent! »

Il posa sa paume sur le cou du Condor, et le força à ouvrir son bec pour laisser entrer ses amis. Mais soudain, une partie de la nef explosa, et la terre trembla sous leurs pieds. Du sable s'envola en tempête, les pierres des ruines s'écroulèrent, et encore plus d'orichalque pourri s'effrita.

« On doit le faire! », insista-t-il. « On est en danger direct! Si le moteur de la nef explose encore, on n'y survivra pas! »

« – Le Condor les protégera du danger. Rien ne pourra le blesser. »

« – Ne dis pas ça! Tu n'es pas invincible, je le sais! Laisse-moi t'aider! »

« – Tu ne comprends pas! Tu ne pourras pas y survivre, et je ne tiens pas à te perdre encore! »

« – Pourquoi tu ne veux pas me faire confiance? Laisse-moi essayer! »

« – Si tu essayes de réparer ces dégâts par toi-même, tu n'en récupéreras jamais! Tu es trop jeune! Tu n'es l'âme du Condor que depuis un mois, alors que j'y suis depuis quatorze ans! »

Sa seule réponse fut du silence. Un silence confus, surpris.

« Quatorze ans…? Mais...tu ne viens donc pas du temps de Mu? »

Killa ne répondit pas. Esteban sentait la lumière se faner autour de lui, et comprenait que son corps se dégradait. Combien de temps avait-il passé hors du Condor?

« Tu es déjà en train de disparaître. », dit cette dernière. « Tu ne peux pas maintenir ta forme plus de dix minutes. Sais-tu ce qui se passerait si tu essayais de réparer de tels dégâts par toi-même? Tu serais perdu pour de bon, et je ne te reverrais plus jamais. »

Une autre explosion secoua la nef, et il put entendre les cris de ses amis malgré sa confusion muette.

« Si l'un d'entre nous doit le faire, alors ce sera moi. J'ai vécu dans ce corps plus longtemps que toi, j'en connais tout. Je sais me servir de ma lumière. »

Il essaya de trouver quoi lui répondre. Quoi lui dire, comment contrer ses arguments, mais ne trouva rien. Il baissa donc la tête, vaincu, et se laissa rappeler dans son corps physique.

Il sentit ses ailes, son bec. Il sentit la douleur qui le mordait toujours. Il sentit le pouvoir, la puissance du Condor, enfouie en lui. Il sentit la gravité et son propre poids qui le poussaient vers le bas. Tout cela à nouveau.

Et il se sentait faible dans son impuissance.

« Tu es vraiment une tête de mule. », dit Killa, quelque part à l'arrière de son âme. « Mais ton cœur est noble. Tu as hérité de la bonté de ta mère. »

« – Qu'est-ce que tu en sais? »

Et elle n'y répondit qu'avec une pointe d'amusement.

« Fais-moi confiance. Je la connais mieux que tu ne le crois. »

Et avant qu'il ne puisse dire quoi que ce soit, la lumière bondit dans chaque recoin de son être.

C'était comme si toute l'énergie qu'il avait accumulée en lui se libérait d'un coup. Il sentait chaque pore, chaque fissure de l'orichalque se remplir de lumière, jusqu'à la plus petite particule s'imbiber d'énergie et de potentiel. La douleur qu'il sentait dans ses plumes se faisait repousser, balayer par cette force qui s'étendait et bondissait dans son corps, une force qu'il avait du mal à contenir.

La nef débordait de fumée noire qui s'élevait dangereusement dans l'air. Les turbines avaient déjà rendu l'âme, mais si la chaudière venait à exploser, c'est le Condor qui en souffrirait. Il essaya de garder l'équilibre alors qu'il retrouvait lentement les sensation de sa queue et son aile gauche. Très lentement; beaucoup, beaucoup trop lentement.

« Tout va bien? », demanda-t-il en lui-même. « Tu vas y arriver? »

« – Je peux le faire! », lui assura Killa. « Mais la fumée cache le soleil...le Condor perd de sa puissance! »

Il le sentait, maintenant. Il se fatiguait, ne sentait plus ses ailes.

« Je ne laisserai pas tomber! Tiens bon! »

Il se concentra, se tourna vers le soleil couvert d'une noirceur flamboyante. C'était le moment où tout le monde s'attendait à le voir agir...mais il n'était pas sûr de pouvoir y arriver. Son âme pourrait-elle encore atteindre quiconque l'entendrait? Il n'y croyait pas une seule seconde.

Mais il devait essayer. Il prit une profonde bouffée de lumière, et fit tonner sa voix.

« Ô Soleil, je ne sais si tu peux m'entendre sous cette forme. Je ne sais si tu peux encore me reconnaître. Mais mes amis et moi avons plus que jamais besoin de toi. Je t'en supplie, Soleil, que tes rayons percent les ténèbres! Chasse les ombres, et illumine le Grand Condor! »

Son corps brilla de toute la force de son souhait, du pouvoir qu'il avait du mal à appeler le sien. Il crut avoir échoué, et regretta sa naïveté; mais l'instant d'après, le soleil brilla encore plus fort, et le vent souffla la fumée au loin. Il sentit les chauds rayons lui toucher le dos, le remplir d'espoir et d'énergie alors qu'il retrouvait le contrôle de son corps. Son moteur s'alluma, les rouages et pistons s'activèrent dans sons ventre ouvert, et ses réacteurs flambèrent.

« Ça fera l'affaire. Vas-y, Esteban, envole-toi aussi vite que possible! »

Pas besoin de lui faire un dessin. Il força sur sa queue, leva les ailes, et décolla d'un bond dans un sillage de lumière dorée. L'instant d'après, la nef explosait dans un torrent de flammes et de tonnerre, le poussant encore plus fort dans les airs.

Il était endommagé. Il était secoué. Mais il était en vie! Ils étaient tous en vie! Une fois le choc passé, l'équipage se confondit en cris de victoire bien mérités.

C'était fantastique!! Vous avez vu toutes ces flammes!?

Tu t'es transformé en feu vivant!!

Promettez-moi de ne plus jamais refaire ce genre de chose!

Rrrk, victoire, victoire!


Il voulait sourire et crier avec eux, mais n'avait plus de bouche pour le faire. Donc il se contenta de faire un tonneau en l'air comme il en avait le secret, secouant un peu ses passagers. Oups, désolé.

Mais malgré son bonheur, quelque chose le tracassait toujours. Laissant le Condor aller à une vitesse de croisière, il regarda en lui, pour essayer d'atteindre cette autre âme qui habitait la machine.

« Killa? Tu es là? »

Il n'eut aucune réponse, et commença à s'inquiéter. Il crut que c'en était fini, que la guérison l'avait achevée, mais il entendit alors la voix. Tue, silencieuse, mais bel et bien là.

« Je suis là. »

« – Tu vas bien? T'es blessée? Est-ce que je dois atterrir? Je- »

« – Esteban, s'il te plaît. Calme toi. »

C'était dur de se calmer quand son amie était sur le point de mourir!

« Je m'en remettrai. Mais j'ai perdu beaucoup d'énergie, et la guérison n'est pas finie. J'ai besoin de plus de temps pour réparer le Condor. »

« – Tu ne dois pas forcer. Je m'en occupe, tu peux piloter pendant que je- »

« – Esteban. »

Ce ton plus sévère lui coupa la parole.

« Je m'en remettrai. Mais je dois me reposer et récupérer. Même si je suis plus vieille que toi, cela m'a vidée de mes forces. Je pense qu'il est temps pour moi de retourner dormir. »

« – Attends! »

Il essaya de rassembler ses pensées. De formuler une demande à lui faire. Mais c'était inutile, car tous deux partageaient une connexion mentale, et elle voyait tout ce à quoi il pensait.

« ...il y a encore tellement de choses que je ne sais pas. », dit-il finalement.

Killa ne répondit pas tout de suite. Certaines questions resteraient sans doute sans réponse pour toujours, se dit-il.

« J'aimerais tant te le dire. Mais tu dois d'abord accomplir ta mission, et je ne veux pas t'en défaire. »

« – ...je sais. »

Il se contenta de voler devant lui, vers un point d'atterrissage plus sûr.

« ...je peux juste te poser une question? Juste une. »

« – Je t'écoute. »

Il essaya de rassembler toutes ses questions en une seule. C'était là une tâche assez difficile. Il se concentra donc sur ce qu'il n'avait aucun moyen de déduire par lui-même.

« Qui c'est, Wayra? »

Le silence régna pendant un moment. Et puis, il eut la sensation d'un sourire heureux.

« Wayra est le nom que ton père et moi t'avons choisi, à ta naissance. »

Il laissa cette réponse le surprendre pendant un moment. Et puis, ce fut à son tour de sourire.

Tout avait un sens. Toutes les pièces se mettaient en place. Et il ne savait pas comment se sentir, car il n'avait plus de cœur pour le faire; mais il avait toujours une âme qui brillait de bonheur, et un esprit qui trouva rapidement les réponses à ses autres doutes.

« ...merci. Pour tout ce que tu as fait pour moi. »

« – Tu sais que je donnerais encore plus, pour que nous continuions ensemble. »

Il savait qu'il n'avait plus d'épaules, que tout n'était que sensations fantômes. Mais pendant un instant, un court instant, il y sentit quelque chose d'étrange et de doux, comme si de chaleureux bras les enlaçaient. Et il comprit donc ce qui se passait, et apprécia cette sensation qu'il n'avait jamais connue auparavant, cette étreinte dont il avait toujours eu besoin sans même s'en douter.

« Je t'aime. », murmura-t-il dans un souffle.

« – Je t'aime. », répondit-elle tout aussi doucement.

Et juste comme ça, la sensation disparut. Il essaya de l'attraper, de la faire durer encore, qu'elle ne finisse jamais. Mais ça ne servirait à rien. Donc il la laissa faire, sans rien dire.

Il continua de voler en silence, la douleur de son corps désormais tue. Il guérirait un jour, et elle s'en irait. Mais en attendait, il lui faudrait attendre le bon moment, pour pouvoir la rappeler. Peut-être qu'ils pourraient se parler davantage...il avait encore tant de questions à lui poser.

...Esteban?

La douce voix de Zia le sortit de ses pensées.

« Présent. »

Tes lumières étaient toutes bizarres pendant un moment. Tu...tu es sûr que tout va bien?

« Ouais. Ouais, je...je suis juste un peu secoué. »

Il volait vers le soleil, suivant la route la plus logique. Il suivait son instinct, faisant confiance à son corps dans sa quête de lumière. Depuis le début de sa carrière de pilote du Condor, il lui avait fait confiance pour prendre la bonne décision, et le suivait autant qu'il le guidait. Maintenant qu'il ne fait plus qu'un avec sa machine ailée, libre de continuer à vivre, il comprenait ce qui portait ses ailes et guidait son bec sur la bonne voie. C'était le chemin de son destin.

« On y va. », se décida-t-il. « On a toujours une quête à accomplir. »

Quand tu veux.

Il sentit les mains de Zia se serrer autour du serpent, attendant son signal. Il sourit intérieurement, et d'un souffle de sa queue, vola vers le soleil.

~~~~~

Le canon fait feu. Il manque de peu, mais il frappe le mur du temple derrière nous. Je vois les pierres et les sculptures qui s'écroulent, alors que les fissures se répandent. Je veux m'enfuir, mais prends la mauvaise direction, et une pique en métal se coince dans mon bras.

Droit dans les joints. Je ne peux plus plier mon aile, elle est coincée. Ma trajectoire se dévie, je ne peux plus me contrôler. Ils crient quelque chose de confus, mais tout ce que je veux, c'est sortir d'ici, loin des canons du bateau volant. Mais je ne peux pas, ses mains s'obstinent sur les commandes. J'arrive à remonter, forçant sur ma queue pour esquiver l'assaut, mais mon aile tordue refuse d'obéir. Je commence à avoir peur.

Soudain, il laisse tomber les commandes. Le pare-brise s'ouvre, et je sens quelque chose sur mon dos. Non! Ne me dis pas qu'il va essayer de retirer lui-même la pique? Je me maintiens comme je peux, mais nous sommes si haut que même le temple brisé a l'air minuscule d'ici. Le bateau reparaît, il va attaquer à nouveau, et ma peur se change en panique.

Le soleil ressurgit de derrière les nuages, et brille fort sur ma coque. Je sens la tension de mon aile disparaître. Il a réussi! Je redresse mon aile, prenant le soleil, mais ses pas se troublent. Il titube.

Le canon tire à nouveau. Rapidement, mon pilote actuel m'ordonne de bouger. Je m'exécute, et évite le boulet, mais les pas disparaissent. Avec horreur, je vois son corps qui tombe.

Je n'agis plus que par panique. Je plonge comme un faucon, tentant de dépasser sa chute. Mon pilote essaie de retenir mes ailes, mais je refuse. Je force encore plus vite, m'arrêtant à quelques pieds au dessus du sol, et me mets en place. Il tombera dans mon cou, à l'abri! Les autres l'attraperont!

Mais dans ma hâte, j'ai mal apprécié la distance. Il ne tombe pas là où je m'y attendais. À la place, j'entends quelque chose s'écraser sur ma coque, quelque chose de lourd qui fait trembler mes plumes. J'entends quelque chose se briser, et l'écho de ce son me prend à la gorge.

Le temps s'arrête. C'est comme si mon cœur avait cessé de battre une seconde fois. J'entends un cri, puis un autre, des voix qui paniquent tout autour. Je ne sais plus quoi faire. Je veux hurler, pleurer, mais je ne peux pas, prisonnière de ce corps de métal. Je suis coincée, et j'ai peur, et il va mourir par ma faute, et la culpabilité m'empoigne comme une vague qui me ballotte dans sa fureur, et je ne peux rien faire, je ne peux rien, par pitié, faites que ça s'arrête,
dites-moi que ce n'est pas vrai, je vous en supplie, quelqu'un, n'importe qui…

Au milieu de tous ces horribles souvenirs, je vois la lumière. Je me souviens du secret qu'Athanaos m'a enseigné. Le secret de la vie éternelle, de l'âme mortelle dans une machine d'orichalque. Le secret qui m'a permis de survivre.

C'est une idée folle, mais je n'en ai pas d'autre. Je dois essayer. J'y plonge, et essaie de le trouver. Je le cherche, je l'appelle avec le désespoir d'une mère cherchant son enfant. J'ai peur, et je sais qu'il a peur lui aussi. Mais je suis là, je serai là, je ne le laisserai pas disparaître.

Dans la pénombre, j'entends sa voix. Sa voix qui crie, qui appelle, qui supplie et se rebelle.


Je ne veux pas mourir!

Tu ne mourras pas, mon enfant. Tu ne souffriras pas. Pas tant que je serai là pour t'aider.

Je tends la main. Il est là. Il est là, et je suis là, et je suis là pour lui. Il n'a plus rien à craindre. Il ira bien, tout ira bien.

Ne t'inquiète pas, Esteban. Tout va bien se passer.

Maman est là.





C'est la fin. J'espère que vous avez apprécié! Moi j'ai bien aimé. N'hésitez pas à laisser vos retours, questions et à me jeter des tomates.
Et pour conclure, voici quelques fanarts pour l'occasion:
night.png
condorswapbw.png
condorswapsunset.png
swapcover.png
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Re: (Fanfiction) Sa Machine Ailée

Message par Akaroizis »

"Moi j'ai bien aimé."

Tu m'étonnes. :roll:
J'ai bien aimé également, et certains de tes fanarts prennent en effet plus de sens désormais. ^^
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Sandentwins
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Re: (Fanfiction) Sa Machine Ailée

Message par Sandentwins »

Si l'auteur n'aime pas ce qu'il fait, c'est mal parti. Donc autant apprécier l'exercice.

Et en parlant d'exercice, j'ai bien aimé traduire. Comme j'aimerais continuer de partager mes textes, je pense passer certains de mes one-shots à la franciseuse, mais je ne sais pas encore lesquels. Donc pourquoi pas vous demander ce que vous aimeriez lire? Voilà quelques-uns des thèmes que je vous propose:


Esteban, Tao et Zia s'aiment vraiment beaucoup: la série, disponible à plusieurs sauces, vous choisissez
Comment Mendoza se retrouve soudainement avec un bébé sur les bras, et pourquoi le vol du médaillon est donnant-donnant
La romance détaillée des parents d'Esteban parce que personne d'autre n'y a pensé, mais elle est vraiment longue donc ce serait traduit en petits morceaux
Esteban se demandant d'où il vient, et pourquoi on l'a abandonné
L'enfance solitaire de Tao sur son île, avec en exclusivité l'origin story de Pichu
Zia et sa nouvelle vie de captive espagnole et c'est pas la joie
Pour les, genre, 3 personnes qui aiment Tao/Esteban, continuez comme ça vous êtes super
Pour les grands amateurs de MendoGuerra, rien d'explicite mais un chouia pimenté
Athanaos est un chaud du slip, et il est temps de payer la pension

J'en ai bien sûr quelques autres sur archiveofourown, si vous y voyez une qui a l'air bien je peux m'y mettre. Je pourrais aussi écrire un nouveau truc, si l'idée vient.
:condor: Le meilleur personnage de toute la série, c'est la mère d'Esteban.:condor:

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S1: 14/20
S2: 15/20
S3: 17/20

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